Une Arabie saoudite Nucléaire avec l’accord de Trump
Arabie saoudite : vers un programme nucléaire controversé
Les États-Unis étudient sérieusement la possibilité d’autoriser l’Arabie saoudite à développer un programme nucléaire civil incluant l’enrichissement d’uranium sur son propre territoire. C’est ce qu’a confirmé Chris Wright, secrétaire américain à l’Énergie, lors d’une visite récente à Riyad. Cette perspective soulève de vives inquiétudes, notamment du côté israélien, en raison des risques potentiels liés à la prolifération nucléaire dans une région déjà instable.
Une ouverture stratégique, mais risquée
Dans ses déclarations, Chris Wright a souligné que les négociations en cours entre Washington et Riyad visent à établir une industrie nucléaire civile saoudienne. Il a laissé entendre qu’un accord pourrait voir le jour prochainement, bien qu’aucune modalité précise ne soit encore arrêtée. L’un des points les plus sensibles concerne l’autorisation pour le royaume d’enrichir de l’uranium, un processus généralement strictement encadré à l’échelle internationale car il peut ouvrir la voie à des usages militaires.
Wright a néanmoins affirmé que cette option restait sur la table, malgré les réserves exprimées par plusieurs parties, en particulier Israël. En effet, permettre un enrichissement local d’uranium reviendrait à accorder une autonomie technologique importante à un pays qui, par le passé, a exprimé son intérêt pour un potentiel arsenal nucléaire, notamment en réponse au programme iranien.
La réaction d’Israël : entre inquiétude et fermeté
Du côté israélien, cette perspective suscite un véritable malaise. Yair Lapid, chef de l’opposition, a exhorté le gouvernement israélien à faire pression sur son allié américain afin d’exclure toute possibilité d’enrichissement d’uranium en Arabie saoudite. Pour Israël, une telle décision pourrait modifier profondément les équilibres stratégiques dans la région.
L’idée initiale de Washington était d’inscrire ce volet nucléaire dans le cadre plus large d’un accord trilatéral entre les États-Unis, l’Arabie saoudite et Israël, comprenant également une normalisation diplomatique entre Riyad et Jérusalem. Mais cette ambition a été largement mise à mal par les tensions accrues depuis l’attaque du 7 octobre et le conflit en cours à Gaza, qui ont ravivé le soutien saoudien à la cause palestinienne.
Des négociations plombées par les conditions de non-prolifération
Pour avancer, tout accord devra obtenir l’aval du Congrès américain, qui pourrait opposer un veto s’il juge les garanties insuffisantes. De nombreux élus, républicains comme démocrates, ont par le passé exprimé leur opposition à toute coopération nucléaire sans garanties très strictes, notamment l’interdiction d’enrichissement d’uranium ou de retraitement de combustible sur le territoire d’un pays tiers.
Or, Riyad a longtemps résisté à ce type de conditions. Mohammed ben Salmane, prince héritier et dirigeant de fait du royaume, a déjà déclaré que l’Arabie saoudite ne resterait pas passive si l’Iran obtenait l’arme nucléaire. Ce genre de déclarations alimente les doutes quant aux véritables intentions du programme saoudien.
Une course à l’influence au Moyen-Orient
Les partisans de l’accord estiment cependant que le refus américain de coopérer pousserait l’Arabie saoudite à se tourner vers d’autres partenaires moins exigeants, comme la Chine. Pékin pourrait y voir une occasion en or d’étendre son influence dans le Golfe, une région historiquement alignée sur Washington. Permettre à Riyad d’acquérir la technologie nucléaire dans un cadre encadré par les États-Unis pourrait ainsi apparaître comme un moindre mal, d’un point de vue géopolitique.
En parallèle, le royaume revendique la présence de réserves locales en uranium, bien que les premiers résultats d’exploration évoquent des gisements peu rentables selon l’AIEA. Cela n’a pas empêché Mohammed ben Salmane de faire de l’indépendance énergétique – au-delà du pétrole – un pilier de sa stratégie de développement à long terme.
Soumis à de nombreux paramètres techniques, politiques et diplomatiques, ce dossier nucléaire illustre une fois de plus la complexité des équilibres au Moyen-Orient, où chaque avancée technologique peut se transformer en levier de pouvoir… ou en source de tensions.
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