Toutes les victimes se valent-elles?

Par Pierre Lurçat

Si l’affaire Al-Dura a marqué une étape importante dans la fabrication par les médias français d’un récit mythique du conflit israélo-arabe, dans le cadre duquel les Palestiniens ont été érigés en victimes absolues, l’affaire Lucie Halimi marquera peut-être une étape supplémentaire dans l’exclusion concomitante des Juifs (et plus seulement des Israéliens) du statut de victimes par ce même récit médiatique.

Dans l’affaire Al-Dura, rappelons-le, un enfant palestinien soi-disant tué par des balles de soldats israéliens, mourrait « en direct » devant les yeux des téléspectateurs français du Journal de 20 heures, convoqués par Charles Enderlin et par France 2 à assister à ce spectacle diffusé en boucle, offert par la suite aux téléspectateurs du monde entier, puis recyclé par la propagande arabo-musulmane et palestinienne à travers d’innombrables discours et sous-produits de ce récit, servant de prétexte et de justification à des attentats, des manifestations anti-juives, etc. Il a fallu l’opiniâtreté de Philippe Karsenty et de quelques autres pour établir que ce « reportage » était une manipulation, voire une pure et simple mise en scène.

Doublement victime

Quinze ans plus tard, l’assassinat de Lucie (Sarah) Halimi atteste que la situation des Juifs en France, qui avait commencé à se dégrader de manière significative à l’époque de la « Deuxième Intifada » – les images de l’agonie de Mohamed Al-Dura ayant largement contribué à importer dans les banlieues françaises le conflit entre Israël et les Palestiniens – a atteint un nouveau stade. Cette femme juive, défenestrée par un voisin musulman après des années de persécutions antisémites à l’encontre de sa famille de la part de son assassin, est en effet doublement victime. Non seulement elle est assassinée de manière particulièrement horrible, mais on lui refuse ensuite le statut de victime, sa mort étant reléguée, comme celle du jeune Sébastien Sellam il y a quelques années, au rang de fait divers ou plutôt de non-événement.

Le procureur de la République déclare immédiatement que les mobiles du crime ne sont apparemment pas antisémites, en contradiction avec les témoignages explicites de membres de la famille de la victime, déclaration répercutée par les institutions juives officielles pour « calmer l’atmosphère ».

L’attitude des institutions juives, dans le contexte pré-électoral potentiellement explosif que traverse la France, alors que les candidats des deux extrêmes ont de bonnes chances d’arriver au second tour, s’explique par la volonté de « ne pas jeter de l’huile sur le feu » et de ne pas introduire dans la campagne électorale un élément juif qui la rendrait encore plus explosive (élément qui a été entre-temps apporté par la candidate Marine Le Pen, en utilisant la question de la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs à des fins politiciennes).

Mais la réalité est plus profonde et plus dramatique encore : dans la nouvelle configuration médiatique créée depuis le début des années 2000, dont l’affaire Al-Dura a été le point culminant, les Juifs n’ont quasiment plus droit au statut de victimes, sauf lorsque ce statut est conforme à l’idéologie dominante partagée par la plupart des grands médias. On imagine aisément quelle place l’affaire Lucie Halimi aurait pu occuper dans les médias si l’assassin, au lieu d’être un musulman « radicalisé », avait été un militant d’extrême-droite. On aurait alors assisté à une manifestation comme à l’époque de Carpentras, tous les candidats de la gauche à l’extrême-gauche défilant en tête de cortège, de la Nation à République…

Un tabou électoral?

Ce qui est en jeu dans l’affaire (ou la non-affaire) Halimi, c’est évidemment l’antisémitisme musulman, nouveau grand tabou de la société et de la politique française. Il n’est pas anodin à cet égard que la sortie de Marine Le Pen sur le Vel’ d’Hiv surgisse précisément au moment où les médias français refusent de parler de l’assassinat de Lucie Halimi. Le message est clair : alors que l’antisémitisme nazi et ses collaborateurs en France font aujourd’hui l’objet d’un consensus, grâce aux efforts de nombreux historiens, militants de la mémoire et au revirement opéré par le président Chirac, rompant avec la tradition instaurée par De Gaulle et perpétuée jusqu’à Mitterrand, l’antisémitisme musulman, lui, demeure un sujet tabou.

Le récent procès intenté à l’historien Georges Bensoussan, spécialiste reconnu de la Shoah, a illustré de manière éclatante l’existence de ce tabou, au moins aussi prégnant – et plus lourd de conséquences – que ne l’a été autrefois celui de la collaboration des gendarmes de Vichy à la déportation des Juifs de France. Si le procureur (c’est-à-dire le représentant de l’Etat) a jugé utile de traîner en justice un historien respecté, avec le soutien des associations antiracistes, c’était tout autant pour punir des propos considérés comme « coupables », que pour dissuader d’autres historiens d’aborder le sujet de l’antisémitisme musulman…

Dans le procès Bensoussan, comme dans l’assassinat de Lucie Halimi, les médias et la justice ont consacré, chacun à sa manière et dans son ressort de compétence, l’existence de ce nouveau tabou de la vie politique française.

La boucle est ainsi bouclée. Après avoir construit un récit mythique du Palestinien victime et d’un Israël toujours coupable, récit dont Mohamed Al-Dura était une des icônes les plus visibles, les médias français ont progressivement et totalement exclu les Juifs du statut de victimes. Le jeune Al-Dura, mort à Gaza dans des circonstances non élucidées, est devenu la victime par excellence, figure mythique et quasiment christique de la « Nouvelle Passion » racontée par France 2 et par son apôtre Charles Enderlin. Lucie Halimi, assassinée par un voisin musulman au cœur de Paris, est une victime inexistante, comme les Juifs expulsés des pays arabes. Elle a été tuée deux fois : la première par son voisin, la seconde, lorsque les médias ont recouvert ce crime d’une chape de silence.

Source : Causeur

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

9 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
madeleine

Récapitulation de cas où l’incompétence, le laxisme, voire la complicité de hauts gradés de la police ont abouti à la mort d’innocentes victimes juives :

Sébastien Sellem, 18 ans, de confession juive, tué à coup de fourchette et énucléé par un voisin de palier musulman. Le tueur a été déclaré « déséquilibré », a été « soigné » dans un hôpital psychiatrique dont il est ressorti libre quelques mois plus tard. N’a donc jamais été jugé ni emprisonné.

Ilan Halimi, Juif, torturé pendant 24 jours par toute une bande de racailles musulmanes, mort de ses blessures. La « police des polices », la très réputée police du 36, Quai des Orfèvres à Paris, n’a pas su (ou voulu) mener cette enquête correctement et où erreurs et fautes se sont accumulées. Une enquête bâclée qui, si elle avait été menée sérieusement, aurait pu sauver la vie de Ilan.

Les trois enfants et le papa de deux d’entre eux à l’école juive de Toulouse. L’assassin, Mohamed Merah, avait été « employé » par les services secrets français qui connaissaient sa radicalisation et sa dangerosité mais ne le surveillaient pas spécialement.

Il y a eu l’attentat du supermarket cacher au cours duquel quatre personnes ont été assassinées par un terroriste musulman.

Puis l’assassinat de Sarah Halimi, rouée de coups et défenestrée. Les policiers stationnaient devant la porte de l’immeuble où habitait Mme Halimi en attendant les secours du RAID. Ils ne sont donc pas intervenus, pendant que l’assassinat avait lieu.

Au cours de trois présidences (Chirac, Sarkosy, Hollande) la montée de l’antisémitisme était niée. Chirac évoquait régulièrement « les violences entre les deux communautés » (juives et arabes), alors que seule la communauté arabe agressait régulièrement la communauté juive. A ce que je sache, pas un seul musulman n’a été blessé ou tué par un Juif.

Alors, laxisme voire complicité de l’Etat ?

maujo

Dans cette video, au debut, Philippe Devillier explique le devenir de la France qui est déja programmé, il est déja trops tard, nous avons été les juifs errants depuis 2000 ans, l’an prochain à Jerusalem.

https://www.youtube.com/watch?v=wVYk2jvKS5k

Mos

Le pouvoir socialiste ne veut pas « perturber » l’ectorat arabe en cette période d’élection. En revanche il a su bien perturber l’élection en sortant les affaires Fillon pour le démolir

moi

S’il faut quitter un jour la France que nous aimons tant et qui nous a tant donné, nous le ferons mais forcément avec une immense tristesse car ce sera avec le sentiment qu’elle sera devenue « invivable », pour nous en tous cas, mais en fait tout court, l’abandonnant ainsi à son triste sort…

Trop c’est trop dit le proverbe, la France a peut-être été trop indulgente, afin de vouloir être généreuse, avec ceux, je ne cite personne, TOUS CEUX, qui ont abusé de sa bonté et ont installé, peut-être de façon irréversible, un climat d’affrontement au sein même du pays entre ses différentes composantes, on ne le sens que trop…

Pauvre France

mikhal

Que fait le crif? Etrangement silencieux …. et joel mergui…..

blum

L’Institut pour la Justice s’est ému de l’assassinat de Mme Halimi, et du silence médiatique concernant cette afffaire.
Personnellement, je juge qu’un cran supérieur a été franchi dans l’horreur: la POLICE, appelée, ETAIT SUR LES LIEUX.
Les forces de police , ne se jugeant pas en sécurité, ont appelé le RAID en renfort.
Pendant que les policiers étaient en train d’attendre, Mme Halimi était assassinée…

trender

Le futur de la nouvelle Europe islamiste est en oeuvre rien ne peut l’arrêter, le drame c’est que si l’Angleterre ose critiquer cette vision en Angleterre, ou aux États-Unis, Israël semble totalement passif…c’est triste car on aurait aimé une demande d’enquête internationale contre la France, mais il ne semble pas que le gouvernement d’israel se sente concerné , dommage

Laloum Daniel

Le problème est que si Mme Halimi n’avait pas la nationalité israélienne (ce que j’ignore) le gouvernement israélien ne peut interférer dans les affaires internes à la France. C’est
comme ça…

Jg

Il y a encore des Juifs qui esperent qu avec le temps ou qu avec les elections, la situation changera .
Ils dechanteront !