Jeûne d’Esther תענית אסתר : rassemblement, élévation et mémoire du peuple Juif
(début : 5H54, fin : 19H17)
Halakha du 11 Adar 5775
Le jeûne dépossède l’homme de son orgueil, le pire des maux de notre humanité.
Il représente l’un des plus grands moyens de purification de l’âme et permet une maitrise de tous les sens ainsi qu’une élévation de l’esprit.
Le Judaïsme n’encourage pas la souffrance mais la mémoire, et le jeûne a pour dessein d’éveiller cette mémoire.
Le jeûne d’Esther, acte de mémoire, démontre la détermination, le courage et le sacrifice de soi du peuple Juif.
Jeûner, réaffirmer sa foi dans les Mitsvot, dans la Torah et dans son attachement à Hachem jusqu’à ce qu’Hachem donne la victoire à Israël, unit, rassemble et maintient le Klal.
Cadre historique :
Contrairement à une croyance populaire, le jeûne d’Esther ne célèbre pas les jours anniversaires du jeûne.
En effet, ce jeûne eut lieu, selon la tradition rabbinique le 13, le 14 et le 15 Nissan (1). L’interdit de jeûner à Pessa’h aurait été outrepassé car, aurait dit Esther, s’il n’y avait plus d’Israël, à quoi servirait Pessa’h (2) ?
Toutefois, l’état d’urgence étant passé, et le Second Temple reconstruit, cet usage ne pouvait être maintenu (3) et le jeûne fut transféré au premier et second lundi ainsi qu’au premier jeudi suivant Pourim (4)
Ce fut selon toute vraisemblance au temps des Gueonim que fut institué le jeûne d’Esther à la date du 13 Adar, car dans le Talmud de Jérusalem (5), qui se basait sur la Meguilat Ta’anit (6), le 13 Adar était un jour de joie, appelé le « Jour de Nicanor », commémorant la victoire de Judas Maccabée sur le général hellène Nicanor (également mentionné dans 2 Macc. 15:35-36), et la coutume de jeûner le 13 Adar n’apparaît ni dans le Tanakh ni dans le Talmud.
En revanche, Rachi (7), et Moïse Maïmonide la mentionnent (8).
La première occurrence du jeûne, ainsi que le calcul de la date se trouvent dans le She’iltot de Rav A’haï Gaon (parashatVayaqhel she’ilta 67:18) :
- le jeûne s’était perpétué depuis, ainsi qu’il est écrit (Esther 9:31) : « Et ils acceptèrent sur eux et sur leurs enfants d’assumer leurs jeûnes et leurs pleurs »
- or, selon le Gaon, Est 9,18 parle d’un treizième jour, et le Talmud de Babylone (Meguila 2a) enseigne que « le treizième jour était jour de rassemblement », ce rassemblement se serait fait dans un but de prière publique et de jeûne.
- du fait de l’interdiction de jeûner le 13 Adar, le jeûne avait été repoussé après Pourim (9).
Rabbenou Tam (cet enseignement ne se trouve pas dans les Tossafot, mais est cité par le Rosh (10) ), le plus éminent des Tossafistes (xiie siècle) enseignait que le jeûne ne commémorait pas celui prescrit par Esther, mais était néanmoins suggéré dans la Meguila : zman qehila signifiait selon lui que le peuple se serait réuni à la veille de la bataille, le 13 Adar, afin de s’attirer la faveur divine. Afin d’appuyer ses dires, Rabbenou Tam faisait remarquer que Moïse jeûna lors de la bataille contre Amalek (11). (http://fr.wikipedia.org/wiki/Taanit_Esther#cite_note-1)
Hashem a écouté les supplications du Peuple Juif et a accepté leur Téchouva et leur jeûne, et, le décret d’extermination a été annulé.
Victoire écrasante car aucun juif ne mourut dans la bataille.
C’est pour cela que nous avons la tradition dans toutes les communautés d’Israël de jeûner ce jour-là chaque année, en souvenir du Miracle dont bénéficièrent les Juifs, et ce jeûne se nomme Jeûne d’Esther (Hadassah (myrte) bat Avihaïl)
Qui est à même de jeûner ?
Les femmes enceintes, ainsi que les femmes qui allaitent sont totalement dispensées du jeûne d’Esther.
En effet, elles sont déjà exemptes des 3 jeûnes mentionnés dans Ze’harya qui sont : le 17 Tamouz, le 3 Tishré (jeûne de Guedalia), le 10 Tevet mentionnés explicitement dans le livre du prophète Ze’harya (chap.8, verset 19),et sont concernées par Tish’a Beav (9 Av), comme MARAN le tranche dans le Shoul’han ‘Arou’h (O.H 554-5).
Selon le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l, – dans son livre Shou’tYe’havé Da’at (tome 1 chap.35) – même si une femme a cessé d’allaiter son enfant, tant qu’elle se trouve dans les 24 mois de son accouchement, et qu’elle ressent encore un état de faiblesse, elle est exempte de jeûner.
Mais si elle se sent la force de jeûner, elle peut faire preuve de Houmra (rigueur) de jeûner dans la mesure où elle a arrêté d’allaiter son enfant, même si elle se trouve dans les 24 mois après son accouchement.
Ces autorisations sont valables uniquement pour les jeûnes du 10 Tevet, 17 Tamouz, et 3 Tishré (jeûne de Guedalia), et à fortiori pour le Jeûne d’Esther.
La femme qui vient d’accoucher
Une femme se trouvant dans les 30 jours après son accouchement, est dispensée de jeûner.
Une femme qui a subi une fausse couche, a le même statut qu’une femme qui vient d’accoucher.
Un malade – (par exemple, une grippe avec fièvre ou baisse de tension qui impose de rester au lit) – qui est simplement alité et qui n’a pas la force de marcher, est exempt de jeûner
Les enfants qui n’ont pas atteint l’âge des Mitsvot (13 ans pour un garçon, 12 ans pour une fille) sont totalement exempts de jeûner, et il n’est pas nécessaire de les faire jeûner quelques heures, car il n’y a aucune notion de ‘Hinou’h (éducation) concernant les jeûnes imposés par nos ‘Ha’hamim (Sages).
Les 3 « Ba’alé Bérit » (« Maîtres » de la Circoncision)
Une Halakha est tranchée dans le Choul’hane Aroukh (O.H chap.559-9), selon laquelle lorsqu’un jeûne public qui tombe un Shabbat (excepté Yom Kippour), et – pour cette raison – le jeûne est repoussé au lendemain dimanche, les 3 Baalé Berit (le père du bébé, le Mohel– celui qui pratique la circoncision – ainsi que le Sandak– celui qui porte l’enfant pendant la circoncision), sont exempts de jeûner.
Un ‘Hatan et une Kala (mariés) pendant leurs 7 jours de réjouissance, sont exempts de jeûner.
Selon le Hyda (Rabbi ‘Haïm Yossef David Azoulay qui est né à Jérusalem en 5484, grand décisionnaire et Kabbaliste dont c’est la Hiloula (jour anniversaire de décès) aujourd’hui), dans son commentaire Birké Yossef (sur O.H 686 note 6) – lorsque le jeûne est effectué à sa date réelle, un ‘Hatan et une Kala sont tenus de jeûner et de terminer le jeûne, puisque le deuil de la collectivité l’emporte sur la réjouissance du particulier.
Lorsque le 13 Adar tombe un Shabbat et que pour cette raison le jeûne d’Esther est avancé au jeudi, le ‘Hatan et la Kala, ainsi que les 3 Ba’alé Bérit sont exempts du jeûne.
« Anénou »
Lors d’un jour de jeûne, dans la prière du matin et celle de l’après midi, on dit le passage de ‘Anenou dans la ‘Amida (prière quotidienne), (« Exauce-nous, ô notre Père! Exauce-nous en ce jour de jeûne, de mortification ; car nous sommes dans une grande détresse…).
Se laver
Aucun interdit de se laver.
Certains Ashkenazim s’’imposent la rigueur sur ce point, puisque telle est leur tradition d’interdire de se laver pendant tous les jeûnes publics.
Cependant, selon la tradition des Séfaradim, c’est tout à fait permis. (Si le jeûne public tombe un vendredi, il est permis de se laver en l’honneur de Shabbat selon toutes les opinions Halakhiques).
Se laver la bouche (brosser les dents)
On peut se rincer la bouche le matin, aux conditions de veiller à ne pas introduire la quantité d’un Reviit (8.1 cl) d’eau en une seule fois. De même, il faudra veiller à ne pas avaler la moindre goutte d’eau, mais tout recracher immédiatement.
Similairement à cela, il est permis de se brosser les dents pendant un jour de jeûne, en respectant les 2 conditions que nous avons citées :
- Ne pas introduire une quantité d’un Reviit (8.1 cl) d’eau en une seule fois
- Veiller à tout recracher sans avaler la moindre goutte d’eau.
Cette autorisation n’est donnée que pour les jeûnes publics, excepté le 9 Av et Yom Kippour.
Manger avant le début du jeûne
Ces jeûnes débutent uniquement à l’aube et se terminent à la sortie des étoiles, excepté le 9 Av qui débute dés la veille au coucher du soleil.
Si l’on ne dort pas, il est permis de se nourrir toute la nuit, jusqu’à l’aube.
Si l’on a dormi :
Selon le Talmud et les Poskim (décisionnaires halakhiques) (Voir Choul’hane ‘Aroukh O.H 564-1), si avant d’aller dormir, on émet la condition de se lever avant l’aube pour consommer, il est permis de se nourrir avant l’aube, mais si l’on n’émet pas de condition, il est interdit de se nourrir avant l’aube.
Conclusion:
Le Jeûne d’Esther a été instauré par Mardochée à la date du 13 Adar (cette année le jeûne est le 4 mars), afin de demander l’aide et la protection divine contre les ennemis d’Israël.
Par le mérite du jeûne et des prières du peuple d’Israël durant les 3 jours qui ont suivis la promulgation du décret de Haman au mois de Nissan, Hashem dans sa Grande Miséricorde les a épargnés.
Pour commémorer ce miracle, nous jeûnerons nous aussi, afin d’exprimer que nos victoires sur nos ennemis dépendent de la Teshouva, de la prière et des Mitsvot.
Notes et références
- ↑B. Meguila 15a, Yebamot 121b, Midrash Sho’har Tov 22.
- ↑Meguila 15a ; Yalkout Shim’oni sur Esther, Remez 800-156.
- ↑traité Soferim 21:1.
- ↑ 17:3.
- ↑Yeroushalmi Ta’anit 2:13
- ↑Rédigée peu avant la destruction du Second Temple. Néanmoins, les jours fériés, pendant lesquels il était interdit de jeûner, furent abolis après la destruction de Second Temple, raison pour laquelle il est possible de jeûner un 13 Adar.
- ↑Responsum de Rachi rapporté dans le Sefer Pardes et le Mahzor Vitry.
- ↑Maïmonide précise même que le 13 Adar est en commémoration, du jeûne tenu à l’époque de Haman – Mishneh Torah Hilkhot Ta’aniot 5:4.
- ↑Ainsi qu’on le trouve dans le traité Soferim.
- ↑Commentaire du Rosh sur le traité Meguila 1:1
- ↑Exode 17:11
Sources :
Un jour, une Halakha de Rubben Salfati , halakha.over-blog.fr
Wikipédia
Recueil : Florence Cherki.
 |
 |
