L’affaiblissement du champ magnétique qui protège la terre contre le rayonnement cosmique et le vent solaire n’est pas un phénomène nouveau, et il n’y a aucune raison de supposer qu’il indique une inversion de ses pôles qui mettrait l’humanité en péril, comme le craignent certains chercheurs.

C’est ce qui ressort d’une nouvelle étude originale multidisciplinaire, menée par le Dr. Erez Ben-Yosef, le Prof. Oded Lifschitz et le doctorant Mike Millman du Département d’Archéologie de l’Université de Tel-Aviv, en collaboration avec le laboratoire magnétique Scripps de San Diego aux Etats-Unis.

Les chercheurs, qui sont parvenus à reconstituer la puissance du champ magnétique terrestre à l’époque du royaume de Juda en examinant des dizaines de jarres datant du 8e au 2e siècle avant notre ère, ont constaté qu’il était beaucoup plus faible qu’aujourd’hui et qu’il a “récupéré” depuis. Conclusion: le champ magnétique terrestre n’est pas en danger d’effondrement.

Les résultats de l’étude, à laquelle a également participé le Dr. Ron Shaar de l’Université hébraïque de Jérusalem, ont été publiés le 13/02/17 dans la prestigieuse revue PNAS.

“Le champ magnétique permet l’existence de la vie sur Terre telle que nous la connaissons”, explique le Dr. Erez Ben-Yosef. « Il nous protège du rayonnement cosmique et des vents solaires, sert à de nombreux animaux pour s’orienter, et a un impact direct sur beaucoup d’autres processus de la nature, comme la production d’isotopes dans l’atmosphère.

C’est grâce à lui que les aiguilles de nos boussoles s’alignent en direction nord-sud. Cependant, le champ magnétique de la terre reste une énigme scientifique entourée de mystère. Pour Albert Einstein la compréhension de la source de ce champ est l’un des cinq mystères les plus importants de la physique » .

MESURER LE CHAMP MAGNÉTIQUE ANTIQUE

Le champ magnétique est généré par la partie dite externe du noyau terrestre, à une profondeur de plus de 2900 km et à une température supérieure à 4000 degrés. Ce noyau externe est principalement constitué de fer liquide. Le déplacement du fer, matière conductrice d’énergie, produit un champ magnétique en raison de la rotation de la Terre autour de son axe. Depuis le milieu du 19e siècle, on a mené des mesures de la force de ce champ, qui indiquent son affaiblissement.

“Depuis le moment où l’on a commencé à effectuer ces mesures, la Terre a perdu environ 10% de son champ magnétique”, précise le Dr. Ben-Yosef. « En outre, nous savons que l’affaiblissement de sa puissance est associé au phénomène de l’inversion des pôles nord et sud, qui se produit en moyenne tous les 250 000 ans.

Le champ  diminue alors pratiquement jusqu’à zéro. Certains chercheurs voient dans la baisse actuelle de l’intensité du champ magnétique terrestre l’annonce d’un tel renversement. L’inversion des pôles inquiète certains et nourrit un bon nombre de théories alarmistes. Bien que la plupart des scientifiques estiment que même une inversion des pôles ne constituerait pas une catastrophe, certains pensent que nous ne pourrons pas exister sans champ magnétique. De toute évidence, toutes ces interrogations conduisent à la question de la force du champ magnétique dans le passé, avant que l’on ait commencé à le mesurer ».

UNE BASE DE DONNÉES D’UNE AMPLEUR SANS PRÉCÉDENT

Pour mesurer le champ magnétique antique, il faut utiliser des matériaux géologiques ou archéologiques, qui l’ont “enregistré” pendant sa formation. Ces matériaux, comme le basalte par exemple, contiennent des particules magnétiques qui se sont agencées en conformité avec le champ magnétique en se refroidissant.

D’une manière générale, les vestiges archéologiques comme les poteries, les briques de terre ou d’argile, les tuiles et les fourneaux constituent une source plus précise que les matériaux géologiques de la puissance du champ magnétique au cours des  10 000 ans qui se sont écoulés depuis que l’homme a appris à utiliser le feu.

Pour réaliser cette recherche, les chercheurs se sont basés sur les études archéologiques  menées sur l’ancien royaume de Juda. “Du 8e siècle au 2e avant notre ére, il existait en Judée un système bureaucratique organisé” explique le Dr. Ben-Yosef. « On  avait pour habitude de poinçonner les poignées des jarres de stockage de différents sceaux, par exemple celui “Pour le Roi”. Ces cachets nous permettent de faire correspondre une date exacte à la puissance du champ magnétique enregistré par les jarres, à quelques décennies près, et donc de reconstituer 600 ans de champ magnétique antique, une base de données d’une ampleur sans précédent ».

Les jarres marquées du sceau «Pour le Roi» du royaume de Juda ont été envoyées au laboratoire des champs magnétiques du Prof. Lisa Tauxe de l’Institut Scripps de San Diego. Les résultats obtenus montrent qu’il n’y a aucune raison de craindre l’affaiblissement du champ magnétique de nos jours, car il était beaucoup plus faible à l’époque, et a “récupéré” depuis. “L’examen de ces jarres a montré que l’intensité du champ magnétique a alors diminué de 20% en 30 ans, de sorte que son affaiblissement de 10% au cours des 180 dernières années n’est pas une cause particulière de préoccupation”, a déclaré le Dr. Ben-Yosef.

“L’étude nous montre que le champ est volatile. Ces nouveaux résultats viennent en fait conforter des conclusions précédentes que nous avons publié en 2009, indiquant que la force du champ magnétique était 2,5 fois plus forte il y a 3000 ans qu’actuellement, soit le champ le plus fort dans l’histoire de la Terre, phénomène que nous avons appelé le ‘pic géomagnétique de l’Age de fer’”.

En plus de son apport à la compréhension du champ magnétique de la terre, les chercheurs espèrent que la nouvelle base de données contribuera également à une meilleure appréhension de l’archéologie locale. « C’est une relation à double sens.

Nous pouvons utiliser une jarre datant de l’an 630 avant notre ère et en mesurer les propriétés magnétiques pour reconstituer la force du champ magnétique antique de la terre, ou bien nous pouvons prendre une jarre dont nous ne connaissons pas l’âge, et utiliser le champ magnétique antique pour la dater. Nous souhaitons établir une base de données sur le champ magnétique antique qui constituera un outil supplémentaire pour la datation archéologique dans la région, similaire à celle au carbone 14 ».

Sivan Cohen-Wiesenfeld | Science – Les amis de l’universite de Tel Aviv

 

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