Comment Les tarifs douaniers de Trump impacteront Israël
L’instauration des nouveaux droits de douane par l’administration Trump à l’encontre du Canada, du Mexique et de la Chine génère déjà de fortes répercussions sur les marchés financiers internationaux. Bien que l’État hébreu ne soit pas directement ciblé par ces mesures protectionnistes, son économie étroitement liée au commerce mondial ne peut rester indemne face aux perturbations provoquées par ces tarifs.
Dans un contexte de mondialisation accrue, où la chaîne de production d’un simple produit traverse souvent plusieurs pays, l’impact de ces mesures se fait sentir bien au-delà des frontières des nations visées. Le Dr Moran Ofir, spécialiste en décisions financières à l’université Reichman, rappelle que l’histoire démontre sans équivoque que toute guerre tarifaire tend à entraîner une hausse des prix pour les consommateurs. « Les économies d’aujourd’hui sont si intégrées qu’un tarif imposé sur un composant importé se répercute inévitablement sur le coût final des produits, » explique-t-il en se référant notamment à l’industrie automobile. Par exemple, de nombreux véhicules fabriqués aux États-Unis incorporent des pièces provenant de l’étranger : l’augmentation des tarifs sur ces pièces se traduit donc par une hausse des prix des voitures.
Ce phénomène n’est pas limité au secteur automobile. L’industrie alimentaire, avec des exemples tels que la transformation des fèves de cacao en poudre, subit elle aussi les effets de ces politiques douanières. Une majoration de 25 % sur un ingrédient brut peut aboutir à un coût plus élevé pour le consommateur final, illustrant ainsi comment des mesures apparemment éloignées de la réalité locale d’Israël peuvent influencer le quotidien des foyers.
Un autre vecteur d’impact concerne les tarifs appliqués au secteur de l’énergie. Bien que le président Trump ait récemment abaissé les droits de douane sur le pétrole importé du Canada, l’imposition de tarifs sur d’autres ressources essentielles contribue à une augmentation générale des coûts énergétiques. Or, dès que le prix de l’énergie monte, l’effet se propage naturellement à de nombreuses industries, rendant la production plus coûteuse et, par ricochet, les produits plus chers pour le consommateur israélien.
Cependant, l’impact des tarifs ne se limite pas à une simple pression haussière sur les prix. Selon le professeur Yossi Spiegel, président de l’Association économique israélienne et membre de l’Université de Tel Aviv, la situation est plus nuancée. La complexité du système économique mondial implique que les effets directs et indirects des tarifs restent imprévisibles. Paradoxalement, si certaines entreprises rencontrent des obstacles à l’exportation vers le marché américain, elles pourraient se tourner vers de nouvelles opportunités d’affaires, notamment en ciblant le marché israélien. Ce détournement des exportations, tout en augmentant la concurrence, pourrait également conduire à une pression à la baisse sur les prix, offrant ainsi une chance aux consommateurs locaux de bénéficier de tarifs plus attractifs sur certains produits.
D’un autre côté, la procureure Eilat Yitzhaki, experte en fiscalité indirecte, souligne que l’environnement actuel incite les entreprises à repenser leurs stratégies. Pour contourner les obstacles posés par la guerre commerciale, plusieurs acteurs envisagent de restructurer leur chaîne de production afin d’intégrer Israël dans leur processus de fabrication. En ajoutant une valeur ajoutée locale – souvent de nature technologique – les produits pourraient ainsi être étiquetés comme « fabriqués en Israël », avantage concurrentiel non négligeable face aux tarifs imposés à l’importation.
Cette dynamique protectionniste ne fait pas l’unanimité sur le marché. Certains industriels, notamment dans le secteur de l’aluminium, voient d’un très mauvais œil la concurrence des produits importés à bas prix. Le PDG d’Axtel Aluminum, Ilan Gur, met en garde contre une possible inondation du marché local par des produits étrangers, ce qui pourrait fragiliser l’industrie nationale et entraîner des suppressions d’emplois dans des zones déjà économiquement vulnérables.
Au final, les répercussions des tarifs douaniers imposés par Trump représentent une épée à double tranchant pour Israël. D’un côté, la hausse des prix des produits importés risque de peser sur le pouvoir d’achat des consommateurs et d’augmenter les coûts de production dans divers secteurs. De l’autre, ces mesures ouvrent la voie à des ajustements stratégiques qui pourraient permettre aux entreprises locales de capter de nouvelles parts de marché et de renforcer leur compétitivité en redéfinissant leurs chaînes d’approvisionnement.
Dans un environnement économique mondial en constante évolution, la capacité des acteurs économiques israéliens à s’adapter sera déterminante pour atténuer les effets négatifs des tarifs et exploiter les opportunités émergentes. Les décisions politiques et les accords de libre-échange, qui lient Israël aux principaux partenaires internationaux, joueront également un rôle crucial dans la détermination de l’ampleur de ces impacts.
En somme, la nouvelle donne tarifaire américaine illustre la complexité d’un système économique globalisé où les mesures protectionnistes, bien que destinées à renforcer certains secteurs nationaux, génèrent des conséquences multiples sur les marchés internationaux. Pour Israël, il s’agit d’un moment charnière : transformer une éventuelle menace en une opportunité stratégique afin de redéfinir ses modes de production et de renforcer sa place dans le commerce mondial.
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