Après les Yézidis – Daech élimine un autre peuple : les Kakaï
6 ans après le massacre des Yézidis par Daech, désormais, les Kakhais sont leur cible principale • Ils vivent en Irak, ils sont moins d’un quart de million de personnes et ne sont même pas reconnus comme une minorité • Leur religion s’appelle Yarsania, amour de Dieu, mais aux yeux des autorités, ils sont considérés comme musulmans • Les jeunes Kakaim reconnaissent qu’il s’agit d’un effort systématique pour dissoudre l’identité Kakai et accélérer l’assimilation qui aboutit à l’islamisation
Aujourd’hui, ils seront commémorés lors de cérémonies de deuil dans de nombreux endroits à travers le monde, et cela convient également ici (en Israël), six ans après l’horrible attaque de l’Etat islamique contre les membres de la communauté yézidie dans les montagnes de Sinjar (dans leur langue : Shingal) dans le nord-ouest de l’Irak. «Jusqu’à présent, environ 3 000 Yézidis sont toujours détenus comme esclaves, principalement en Turquie. Cependant, presque personne ne mentionne la petite minorité approchant du seuil d’extinction – les Khakai, ou comme on les appelle en arabe « le peuple de la justice ». Les attaques de Daesh montrent des signes alarmants de réveil ces jours-ci.
Les Yézidis n’étaient pas reconnus dans le monde entier, jusqu’en 2014 : l’ONU a jugé qu’ils avaient subi un «génocide», et une merveilleuse militante yézidie, Nadia Murad, a reçu le prix Nobel. Cependant, la plupart d’entre eux n’ont pas reçu d’aide pour s’échapper des camps de réfugiés où ils sont confinés. Au cours des deux dernières années, une milice kurde s’est formée en tant que combattants contre les Turcs qui ont d’ailleurs capturé, ces dernières semaines, une vingtaine d’avant-postes militaires dans la région.

Les voisins musulmans ont perçu pendant des siècles les Yézidis comme des «serviteurs de Satan», bien que leur religion soit un mélange mystique de l’islam, de la religion de la lumière et du feu persan antique, et qu’elle contienne même un peu de judaïsme. Il semble cependant que les Yézidis soient en grande partie protégés dans un avenir prévisible de l’extinction, puisque la sympathie de la communauté internationale leur est garantie. Ce n’est pas le cas des Khakai, dont même le nom n’est pas du tout connu des médias.

Les Kakhais comptent moins d’un quart de million de personnes en Irak – environ la moitié du nombre de Yézidis – et contrairement à eux, ils ne sont pas reconnus comme une minorité (avec des droits de protection). Ils sont inévitablement enregistrés comme musulmans. Seul le parlement de la région kurde leur a été attribué un unique siège. Ils appartiennent à une religion vieille de 700 ans, la Yarsania (amour de Dieu), et gardent avec zèle, encore plus que les Alaouites et les Druzes, ses secrets. Le nom Kakhai leur est attaché depuis des générations car ils se réfèrent à leurs dignitaires selon le terme kurde de « Kakah », qui signifie frère. Leur dialecte kurde n’est pas compris par les autres (Kurdes).

L’organisation clandestine de l’Etat islamique? dans plusieurs provinces du centre de l’Irak, a déjà engendré une série d’attaques meurtrières contre les communautés de Kakhaï, en particulier autour de leur ville principale – Dakuk. Ils fuient la plupart des villages où ils vivaient et ont tendance à cacher leur appartenance religieuse, voire leur marque de fabrique – les moustaches torsadées, qu’ils doivent raser.
Ceux qui restent chez eux n’osent pas se déplacer sur les routes et ont déjà vendu des champs isolés qu’ils possédaient. Leurs lieux de culte sont abandonnés parce que les croyants ont peur d’être exposés. Les jeunes militants Kakai se plaignent qu’il s’agit d’un effort systématique pour dissoudre l’identité Kakai et accélérer l’assimilation qui aboutit à l’islamisation.

La petite milice qu’ils ont créée pour tenter de se défendre contre Daesh s’est déjà évaporée. Sur la chaîne de télévision Kurdistan 24, Rajab Kakhai, l’un des chefs de la communauté, a récemment déclaré que leur «démographie» était en train de changer, pour le pire.
Ils sont pris entre le marteau de l’Etat islamique qui les frappe et l’enclume des forces irakiennes qui interdisent les études en dialecte khakai et ont récemment empêché le chanteur de la communauté, Robert Rashid, d’enregistrer quelques chansons dans leur langue.

Leur tragédie est qu’ils vivent dans les zones contestées entre le gouvernement kurde et le gouvernement de Bagdad, le no man’s land où il n’y a pas de véritable règle. Le chef de la communauté, Nasser Hyderi, appelle à la protection des villages de son peuple et n’a jusqu’à présent pas reçu de réponse.
Sous nos yeux, le piétinement d’une petite nation ancienne et particulière se déroule à un rythme assez rapide. S’ils abandonnent le dernier des villages en leur possession, ils seront condamnés à la disparition.


Adaptation de l’hébreu : Marc Brzustowski
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Pourquoi le nom de l’auteur de l’article ne se trouve pas après le titre ? Il y a 2 photos, la 1ère avec un nom, la 2ème sans nom. Doit-on jouer aux devinettes ?
En plus vous le dites, le nom y est : Ehud Yaari. C’est un site de réflexion, pas un centre d’assistanat. Prenez-vous en main