La Turquie réintégrée comme médiatrice en cas de nouvelle guerre entre le Hamas et Israël

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L’accord de réconciliation entre Israël et la Turquie sera signé, malgré les protestations et l’opposition flagrante de l’appareil de la défense [autant l’ancien que l’actuel Ministres, Moshe Ya’alon et Avigdor Lieberman, qui a déclaré que développer des relations plus étroites avec Erdoğan serait ridicule, qu’Erdoğan est une sorte de successeur direct de Goebbels et que la Turquie elle-même héberge les principaux dirigeants du Hamas terroriste, dont ceux responsables du kidnapping et du meurtre des trois adolescents israéliens dans le Gush Etzion en 2014]. Il y a eu peu de débats publics sur la question de cet accord, malgré ses aspects symboliques et moraux forts et on a assisté à peu de délibérations de la part des décideurs politiques, si jamais il y en a eu. 

L’accord est presque un projet personnel du Premier Ministre Binyamin Netanyahu, alors que tous les contacts ont été menés par son envoyé spécial Joseph Ciechanover, appuyé par le Président en activité du Conseil de Sécurité National, Ya’akov Nagel. 

Il apparaît que l’accord ne sera pas formellement signé cette semaine, mais que les détails seront finalisés par les deux partis, lors d’une réunion qui devrait se tenir en Europe de l’Est. La signature officielle de l’accord devrait avoir lieu le mois prochain.

L’accord doit traiter de toutes les controverses en suspend entre les deuxparties, depuis l’incident du Mavi Marmara, en mai 2010. Même si le blocus maritime ne sera pas levé, Israël est prêt à montrer dela flexibilité concernant l’entrée à venir des produits turcs dans la Bande de Gaza.

(Notons en passant que la semaine dernière, le Ministre israélien du transport, Yisraël Katz a suggéré la construction d’une île artificielle aux larges des côtes de Gaza, dans le but d’y faire inspecter les navires-cargo. Difficile de savoir à quel point le calendrier d’apparition de cette idée n’a rien d’une coïncidence.  Par le passé, Israël a sérieusement envisagé de mener des fouilles de sécurité des navires-cargo chargés de produits pour Gaza, dans les ports chypriotes, aussi cet arrangement n’a rien d’impossible sur le long terme).

Avec l’aboutissement de cet accord, on peut facilement voir combien de réussite il apporte au dirigeant turc Tayyip Recep Erdogan. La Turquie est actuellement engagée dans une période politique difficile, en particulier depuis l’incident où la Turquie a abattu un avion de combat russe au-dessus de l’espace aérien syrien.

Le Président russe a donné une leçon douloureuse à Erdogan et mené l’industrie turque du tourisme à un arrêt presque total. Les Kurdes provoquent aussi la perte de sommeil d’Erdogan, à cause de l’Etat de facto qu’ils instaurent le long de la frontière entre la Syrie et la Turquie, autant qu’à cause des attaques terroristes récurrentes qui déroulent à Istanbul, Ankara ou ailleurs.

Cet accord avec Israël représente une réalisation diplomatique et économique conséquente pour Erdogan : les Turcs veulent être acteurs du nouveau marché des énergies au Moyen-Orient. L’un de leurs objectifs est, d’abord, de réduire leur surdépendance vis-à-vis du gaz russe. Ils cherchent aussi à développer des projets d’une valeur de centaines de millions de dollars dans la Bande de Gaza, selon cet accord. Entre autres choses, les Turcs veulent instaurer un nouvel hôpital, une centrale électrique et un site de dessalinisation, en collaboration avec l’Allemagne.

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Par-dessus tout, le dirigeant turc, membre des Frères Musulmans, veut qu’on le décrive comme « Le défenseur des Arabes » et être perçu comme celui qui veille sur les intérêts des résidents de la Bande de Gaza. Cet accord lui permet d’accomplir son rêve, au moins partiellement.

D’un point de vue israélien, cependant, cet accord de réconciliation est bien plus complexe : cet accord va sûrement mettre la Russie en colère (bien que Poutine, qui, là aussi a besoin d’un médiateur, ait pu dire le contraire à Moscou, dernièrement), alors qu’Israël maintient avec elle des relations sensibles, autant qu’avec les nouveaux alliés d’Israël au cours de ces dernières années : la Grèce et Chypre, qui sont des ennemis jurés des Turcs. Alors que les négociations progressaient ces dernières semaines, les Grecs ont transmis plusieurs messages par des canaux diversifiés pour faire comprendre que la Grèce « est le véritable allié » (naturel) d’Israël. Ces efforts ont, cependant, échoué à interrompre la percée avec Ankara.

Nombreux sont ceux, dans l’appareil de la Défense, dont l’ancien Ministre Moshe Boogy Ya’alon, mais aussi l’actuel, Avigdor Lieberman, qui ne croient pas un seul instant que la Turquie puisse retrouver son statut « d’Etat ami », à cause de l’idéologie des Frères Musulmans du parti au pouvoir. D’un autre côté, Israël a un intérêt évident à établir un axe contre Daesh le plus large possible dans le Bassin Méditerranéen, qui puisse compter dans ses membres la Grèce (pour l' »Europe) et la Turquie.

Par-dessus tout, il semble que l’intérêt d’Israël dans cette réconciliation avec la Turquie concerne essentiellement le Hamas à Gaza, puisque l’une des leçons de l’Opération Bordure Protectrice est qu’il n’y avait pas de médiateur pour mettre un terme certain et définitif aux combats. La médiation égyptienne était inacceptable pour le Hamas, à cause de l’énorme animosité entre les deux parties, alors qu’Israël n’a permis l’intervention d’aucun pays lié aux Frères Musulmans – nommément la Turquie et le Qatar – à aucun moment des négociations.

Dès que l’accord de réconciliation sera signé, la Turquie deviendra instantanément la route la plus efficace pour transmettre des messages au Hamas. Cela n’empêchera pas la prochaine guerre à Gaza, qui pourrait survebnir à la suite de mauvaises interprétations d’intentions de part et d’autre, mais cela permettra de mettre en place un mécanisme pour mettre un terme aux combats.

Il y a quelque chose qui ne se produira absolument jamais comme conséquence de cet accord de réconciliation : bien que les Turcs auraient été contents de recevoir l’assistance israélienne dans leur lutte contre les Kurdes, les relations stratégiques et sécuritaires entre les deux pays  ne reviendront jamais aux « Jours Glorieux » qui remontent avant la prise du pouvoir par Erdogan. Cependant, les relations économiques entre les deux pays, qui concernent des échanges commerciaux de de 5 millions de $ américain par an, continueront de fleurir – d’ailleurs avec ou sans accord-…

Amir Rapaport | 23/06/2016

israeldefense.co.il

Adaptation : Marc Brzustowski.

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Ratfucker

Magouiller avec les bourreaux des Arméniens, des Grecs, des Kurdes est non seulement indigne, mais ne nous apportera à terme que des retours de bâton.

martin54

approuved

Paula KOIRAN

C’est une honte de s’allier avec un hypocrite comme Erdogan. Israël aurait mieux fait de s’allier aux kurdes, qui ont montré que ce sont de vrais hommes, je ne vois pas ce que l’on peut attendre de bien avec une alliance avec la Turquie.