Attentat de Manchester : en alerte maximale, la police britannique traque un «réseau»

Des policiers investissent un immeuble résidentiel de Manchester dans le cadre de l'enquête sur l'attentat.

VIDÉO – L’armée est déployée à Londres pour protéger des sites sensibles. À Manchester, les enquêteurs cherchent des complices de l’auteur de l’attentat suicide de lundi soir.

Envoyé spécial à Manchester

À circonstances exceptionnelles, mesures extraordinaires. La relève de la garde a été annulée à Buckingham Palace. Un millier de soldats ont été déployés pour protéger, entre autres, le Palais royal, Downing Street et le Parlement, où l’accès du public a été suspendu. Près de 3 000 autres militaires sont prêts à entrer en action, sous l’autorité de la police. Ils devront épauler les policiers dans la sécurisation de lieux sensibles et de manifestations publiques, concerts ou événements sportifs. La décision a été prise mardi soir, après le relèvement du niveau d’alerte terroriste à son seuil maximal – «critique». La suspicion que l’auteur de l’attentat suicide de Manchester, qui a fait 22 morts et plus de 60 blessés, n’était pas un «loup solitaire», fait craindre aux autorités un risque de nouvelle attaque «imminente». Les Anglais vont donc s’habituer à vivre sous protection militaire dans le cadre de l’opération «Temperer», comme les Français depuis plus de deux ans avec «Sentinelle». Ce recours aux forces armées en Grande-Bretagne rappelle les heures noires du terrorisme nord-irlandais.

Un millier de soldats ont été déployés à Londres pour protéger, notamment, le palais royal, Downing Street et le Parlement.

À Manchester, des commandos SAS ont été envoyés en renfort de la police. Les enquêteurs travaillent maintenant sur un «réseau» de complicités impliquées dans l’attentat. Ils recherchaient activement l’artificier qui aurait fabriqué la bombe artisanale. Ils ont poursuivi l’examen des relations de Salman Abedi, 22 ans, tué dans l’explosion de son engin mortel, lundi soir à l’Arena où se terminait le concert d’Ariana Grande. Et notamment de sa famille. «Il semble probable, possible, qu’il n’a pas agi seul ; les services de renseignement et la police remontent par conséquent leurs pistes afin d’obtenir toutes les informations dont ils ont besoin pour assurer notre sécurité», a précisé la ministre de l’Intérieur, Amber Rudd. Après son frère, Ismail, 23 ans, la veille, cinq autres personnes ont été arrêtées mercredi, dans les quartiers sud de la ville et dans la banlieue. Une perquisition a eu lieu dans un appartement du centre-ville, loué via Airbnb, selon des voisins.

» Manchester: une sixième personne interpellée

Il se confirme qu’Abedi était «connu» des services de sécurité. Il serait revenu très récemment d’un voyage en Libye, pays d’où ses parents étaient originaires. Son père et son plus jene frère, Hashem, ont été arrêtés mercredi à Tripoli. Ce dernier, né en 1997, était surveillé depuis un mois et demi par les forces de sécurité libyennes. Il aurait revendiqué son appartenance à l’État islamique et «était au courant du projet d’attentat» de son frère, selon un porte-parole des autorités. Le père, Ramadan Abedi, a, de son côté, nié que Salman ait été un extrémiste. Il aurait eu un dernier contact avec son fils cinq jours avant l’attentat.

Les frères Salman et Ismail Abedi vivaient dans le quartier de Fallowfield, au sud de Manchester, non loin de la maison de leurs parents. Une zone pavillonnaire moyenne, ni misérable ni opulente. À un peu plus d’un kilomètre de là, dans un quartier plus cossu, Salman fréquentait, comme sa famille, la mosquée de Didsbury, une ancienne église en briques rouges reconvertie. L’édifice est gardé par deux cars de police et de nombreux agents en gilets fluorescents. Une autre mosquée de la ville a été victime d’une tentative d’incendie dans la nuit de lundi à mardi. «Voulez-vous connaître l’islam?», interpelle une banderole sur la façade de celle de Didsbury. «L’islam est une religion de paix», plaide, devant le bâtiment, Halima Khan, animatrice en relations sociales, la tête voilée de noir. «Je connais ma mosquée. Si quelqu’un était suspecté d’activités répréhensibles, il serait immédiatement dénoncé», assure cette femme, qui dit ne pas avoir connu Abedi.

Pourtant, c’est là qu’il fréquentait un recruteur prolifique de Daech, selon Sky News, citant des sources proches de l’enquête. Rafael Hostey, alias Abu Qaqa al-Britani, tué par un drone en Syrie l’an dernier, vivait dans le quartier de Moss Side, à une encablure de celui où vivait Abedi. Deux lycéens auraient alerté une ligne rouge antiterroriste il y a plusieurs années pour s’inquiéter des idées exprimées par leur camarade Salman Abedi, rapporte la BBC.

Frappée pour la première fois par le terrorisme islamiste, Manchester est le troisième foyer de radicalisation du pays, après Londres et la région de Birmingham. Les autorités locales y ont renforcé ces dernières années leurs actions de prévention. La ville est un melting-pot où coexistent des représentants de 90 origines différentes. Environ 15 % de ses habitants sont musulmans. La communauté libyenne locale est la plus importante du pays.

«Manchester a connu récemment une vague de recrutements de l’État islamique, avec au moins seize de ses résidents, la plupart britanniques, partis en Irak ou en Syrie. Certains sont toujours vivants, d’autres ont été tués. Ils sont souvent issus d’un même quartier et sont passés par les mêmes filières de radicalisation», décrit Emma Webb, chercheuse au cercle de réflexion Henry Jackson Society. Abdalraouf Abdallah, 22 ans, condamné l’été dernier à cinq ans et demi de prison pour ses liens avec Daech, est lui aussi d’origine libyenne. C’est aussi de là que sont parties les fameuses «mariées djihadistes», Salma et Zahra Halane, des jumelles adolescentes qui ont quitté leur école en 2015 pour rejoindre l’État islamique.

Des contacts existent aussi avec des réseaux djihadistes d’autres pays européens. Mohamed Abrini, le fameux «homme au chapeau» des attentats de Bruxelles et Paris, est passé par Manchester, où il aurait recueilli des fonds.

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