Les terroristes-suicide de Daesh en Europe ont fait explosé le mythe du « loup solitaire »

De nouvelles preuves montrent que les attentats en Europe ont été méticuleusement planifiées et dirigées depuis la capital de fait de Daesh en Syrien – les rendant ainsi bien plus difficiles à arrêter. 
Ten perpetrators of the November 2015 Paris attacks. Ringleader Abdelhamid Abaaoud is at the top-left

Quand les attentats islamistes ont repris sur le sol européen, à la suite du développement du djihadisme en Syrie, la sagesse populaire a d’abord préféré tenir leurs auteurs pour de simples « loups solitaires », des individus indépendants inspirés de loin par la propagande sur Internet de groupes tels que l’Etat Islamique (Daesh), mais sans liens organisationnels formels avec eux.

Le citoyen français Mehdi Nemmouche, par exemple, qui a tiré mortellement sur quatre civils au Musée Juif de Bruxelles le 24 mai 2014, a été considéré par le bureau du procureur belge comme « ayant probablement agi seul ». 

Nemmouche a continué à être décrit tout naturellement dans les reportages de presse comme un « loup solitaire » durant des mois après son attaque, en dépit de révélations sur le fait qu’il ait passé un an à combattre en Syrie pour Daesh. Le consensus large parmi les analystes politiques et sécuritaires, pendant ce temps, maintenait que Daesh (à la différence d’Al Qaïda) était beaucoup moins enclin à prendre les villes occidentales pour cibles, préférant se focaliser sur la construction d’un « Califat » en Syrie et en Irak et combattre les Chiites et d’autres confessions minoritaires musulmanes ou non plus près de son bassin territorial.

Les attentats majeurs récents à Bruxelles et Paris, cependant, qui, à eux deux ont tué 165 civils, ont montré que la thèse du « Loup solitaire » était tragiquement et dangereusement peu fondée. Comme un reportage d’investigation du New York Times l’a présenté en détail mardi, tous les attentats djihadistes les plus significatifs en Europe depuis 2014, dont le tueur du Musée Juif de Bruxelles, ont méticuleusement été planifiés et dirigés par les cercles dirigeants de Daesh depuis sa capitale syrienne à Raqqa ; les agents opérationnels terroristes ont presque toujours suivi un entraînement et disposent d’une expérience du combat au sein des rangs djihadistes à l’intérieur du territoire syrien ( l’exception est le massacre de l’équipe rédaction du magazine Charlie-Hebdo à Paris, en janvier 2015, qui a été menée en coordination avec Al Qaïda dans la Péninsule Arabique basé au Yémen – une fois encore cependant, sans initiative d’un « loup solitaire »).

En effet, les cinq attentats majeurs depuis lors ont essentiellement été commis par la même et unique cellule de Daesh, selon le Times. Citant « des procédures des tribunaux, des transcriptions d’interrogatoires et des enregistrements d’écoutes européennes », le journal a établi que chaque opérateur terroriste, depuis Nemmouche jusqu’aux terroristes-suicide de l’aéroport international Zaventem de Bruxelles et de la station de métro de Maelbeek, le mois dernier, avaient des liens avec Abdelhamid Abaaoud, un belgo-marocain âgé de 28 ans et responsable de cellule au sein de Daesh, qui partageait son temps entre la Syrie et l’Europe. 

C’est Abaaoud qui a envoyé Sid Ahmed Ghlam pour faire exploser des églises à Villejuif au sud de Paris en avril 2015 (il a assassiné Aurélie Châtelain avant d’être arrêté) et qui a expédié Ayoub El Khazzani ouvrir le feu dans un train entre Amsterdam et Paris, quatre mois plus tard ( il a été maîtrisé par les passagers après en avoir blessé trois). Abaaoud a aussi personnellement entraîné des recrues en Syrie, comme Reda Hame, qui a été arrêté à Paris en août 2015 avant qu’il ne soit en mesure d’exécuter un complot à l’arme à feu. Bien plus infamant, Abaaoud a poursuivi en dirigeant l’équipe d’au moins 9 terroristes de Paris en novembre 2015, où il a probablement lui-même ouvert le feu sur un restaurant avant de s’enfuir. Bien qu’il ait été tué dans un raid de la police à Saint-Denis (93) cinq jours plus tard, son complice Salah Abdeslam a réussi à échapper à toute capture vers Bruxelles pendant quatre mois. On pense que l’arrestation effective d’Abdeslam le 18 mars a accéléré les attentats de l’aéroport et du métro quatre jours plus tard. 

Que tous les membres importants de la cellule Abaaoud soient, soit morts ou en détention n’implique ne aucune façon que la menace de Daesh sur l’Europe soit maîtrisée, affirment les analystes. D’une part, d’autres cerveaux terroristes et planificateurs comme Salim Benghalem – que Michaël Weiss, le co-auteur de ISIS: Inside the Army of Terror /Daesh, au sein de l’Armée de la Terreur, a présenté à NOW comme le « véritable cerveau des Attentats de Paris, et qui est actuellement « le chef des opérations européennes de Daesh » – demeurent en liberté en Syrie. D’autre part, au moins 400 djihadistes ont été entraînés et déployés vers l’Europe pour mener de futures attaques, selon les responsables de la sécurité, cités par Associated Press, mercredi dernier. 

« Si je devais faire un pari, je le placerai fortement sur le fait que la menace n’a pas encore disparu », a déclaré à NOW Daveed Garstenstein-Ross, chercheur principal à la Fondation pour la Défense des Démocraties.

En effet, avec les attentats sur le territoire de l’ennemi qui font désormais partie intégrante des opérations centrales de Daesh, la menace en Europe persistera aussi longtemps que Daesh existe, affirment les analystes.

« L’organisation est en train de bifurquer », déclare Weiss à NOW. « C’est encore une organisation unique, mais, en effet, vous trouvez deux bras différents. L’un est constitué de l’infanterie, des commandants de champs de bataille, le Daesh intérieur et les services intérieurs de sécurité, leur « FBI », leur Ministère de l’Intérieur et ainsi de suite. Et ensuite,vous avez essentiellement la « CIA » de Daesh. Et les Services des opérations spéciales de Daesh, si vous voulez vraiment être prétentieux, parce que, avouons-le, ce que c’est types font n’est pas professionnel, à proprement parler, mais ce n’est certainement pas amateur non plus ».

Etant donné que Daesh ne va pas disparaître comme par miracle du jour au lendemain, dans des temps rapprochés, il demeure beaucoup à faire pour les Etats européens pour minimiser la menace dans le même temps, disent les analystes. Pour Weiss, une des priorités est de « stopper les gens pour les empêcher de rejoindre les djihadistes, depuis l’Europe », en tout premier lieu – quelque chose qu’il dit être loin d’être facile à faire ces dernières années. Par exemple, Abaaoud, selon Weiss, a été recruté par  Khalid Zerkani, dont le pseudo est « Papa Noël », un djihadiste vétéran qui a financé des dizaines de voyages de Belges vers la Syrie, tout en  » se cachant et en agissant aux vu et au su de tous » à Bruxelles, la Capitale de l’Europe ».

Pour sa part, Garstenstein-Ross, plaide dans de récents éditoriaux pour que les Etats Européens adoptent ce qu’il appelle « Le Modèle Al Capone », afin de démanteler les réseaux intérieurs djihadistes. Il fait cette référence au fait que le gangster américain notoire qui a fini par être poursuivi, après des années de liberté, sur l’accusation comparativement mineure d’évasion fiscale.

« Ils ont besoin de coincer les réseaux djihadistes, immédiatement », déclare Garstenstein-Ross à NOW.  » Donc, si quelqu’un est impliqué dans des crimes financiers apparemment bénins, du trafic de drogue, etc., prenez-les sur ces motifs […] Ce n’est pas une solution complètre ni statisfaisante, mais cela répond au problème très immédiat ».

Sur le plus long terme, cependant, la priorité doit demeurer de vaincre complètement le groupe  dans son sanctuaire mésopotamien », selon Garstenstein-Ross.

« Il y a un bénéfice direct à s’assurer que Daesh perd du terrain en Syrie », dit-il à NOW.

« Le fait est que lorsque vous avez un groupe terroriste que jouit de l’équivalent d’un parrainage d’Etat depuis le terrain que Daesh détient en Syrie, cela le rend plus efficace dans ses opérations, point final ».

ALEX ROWELL

Publié le : 1/04/2016 07:20 PM

now.mmedia.me

Adaptation : Marc Brzustowski

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