L’accord israélo-turc complète le jeu anti-iranien ©

L’accord de réconciliation annoncé lundi 27 juin, qui vise à restaurer la pleine normalisation entre Israël et la Turquie, après six ans d’animosité ranimera progressivement la coopération en matière de renseignements et de sécurité entre les deux pays et entraînera,à termes, des exercices militaires conjoints et des investissements dans les domaines de l’énergie et de la défense.

 

Les experts en sécurité de Debkafile évaluent cet accord comme offrant une plus-value précieuse en un temps opportun pour les intérêts israéliens en au moins huit points :

1. Il s’adapte parfaitement à l’actuelle tentative conjointe saoudo-égyptienne envers Israël, afin de renforcer leur alliance en formation avec la Turquie, qui est conçue pour tracer une ligne sunnite contre les mouvements expansionnistes de l’Iran dans la corne de l’Afrique, la Mer Rouge, les Détroits d’Aqaba et en proximité inconfortable avec les rives de la Méditerranée, vis-à-vis de l’Egypte et d’Israël.

2. Il est conçu comme le précurseur d’une série d’accords qui s’imbriquent. Debkafile est en mesure de dévoiler que le prochain accord bilatéral dont on attend la conclusion, concerne l’accord de réconciliation entre la Turquie et l’Egypte, pour que les Présidents Recep Tayyip Erdogan et Abdel-Fattah Al Sissi enterrent la hache de guerre. En au moins un de ses aspects, il sera modelé sur l’accord turc avec Israël : la Turquie s’engage à ne pas laisser le Hamas agir sur son territoire contre Israël et, du même coup, ne pas permettre au parent du Hamas et archi-ennemi d’Al-Sissi, les Frères Musulmans, d’opérer à partir de la Turquie.

3. De ce point de vue, l’Egypte et la Turquie maintiendront une certaine coopération militaire.

4. Les mécanismes bilatéraux en matière de renseignements qui vont se mettre en place entre la Turquie et Israël et la Turquie et l’Egypte mettront leurs contributions en commun sur l’Iran.

5.  Cet aspect central de la coopération renouvelée entre Ankara et Jérusalem lui prête une dimension de renseignements militaires plutôt que de simple protocole diplomatique. Cette dimension  trouve son expression dans la décision de déléguer sa mise en œuvre, non pas aux détenteurs de bureaux politiques, mais aux chefs des services de renseignements militaires des deux pays.

Le Chef d’Etat-Major, le Lieutenant-Général Gady Eisenkot, auquel défère le chef des renseignements militaires, sera en fait en charge de ces échanges, ainsi que des exercices militaires conjoints qui sont à un stade actif de planification.

Réalisant qu’on était allègrement passé par-dessus son épaule pour faire avancer cette facette importante de la coopération avec la Turquie, le nouveau Ministre de la Défense d’Israël, Avigdor Lieberman a annoncé qu’il s’opposait à cet accord. On ne l’a guère plus considéré que comme une protestation symbolique qui n’entraverait pas les démarches en cours.

6.  La Jordanie est un autre acteur prévu de la nouvelle alliance. Le Roi Abdallah est actuellement engagé dans le processus de démantèlement tranquille des réseaux des Frères Musulmans dan son royaume. Beaucoup de leurs membres appartiennent au Hamas palestinien.

7.  Dans le cadre de cet accord, Israël et la Turquie commenceront des pourparlers formels afin de bâtir un pipeline de gaz entre les deux pays, par lequel Israël sera en capacité de vendre son gaz naturel avec l’assistance de la Turquie, à l’Europe.

Debkafile site comme fondamentale cette condition pour la totalité du processus et d’importance cardinale pour les deux sortes d’intérêts. Israël a besoin d’un client majeur afin de stimuler le développement de ses champs gaziers au large, alors que la Turquie  cherche à être ce client et, en même temps, la Russie est en quête d’une part de ce bonus énergétique et surtout d’un contrat de construction du pipeline vers l’Europe.

Jusqu’à tout récemment,Israël s’est abstenu de signer quoi que ce soit avec Moscou,principalement à cause des pressions de Washington. Mais, ces derniers mois, les conversations entre Binyamin Netanyahu et Vladimir Poutine ont progressé vers un dialogue stratégique ouvert sur les questions du Moyen-Orient, particulièrement sur la Syrie. Cela a ouvert la porte à un rôle de la Russie qui a été bordé en ce qui concerne l’exportation de gaz israélien.

8. L’idée de ce rôle a fait un nouveau pas en avant ce lundi. C’est maintenant la collaboration israélo-turco-russe, dans le domaine des renseignements militaires concernant la sécurisation des plateformes israéliennes d’extraction de gaz au large des côtes méditerranéennes, qui est mise sur la table : cette perspective a poussé le Président turc a finalement demander pardon pour l’action de ses forces aériennes, qui ont abattu un bombardier SU-24M russe au-dessus de la frontière turco-syrienne, le 24 novembre 2015.

Pour assurer le salut de ces relations promises, la Turquie est prête à offrir des compensations, dans le dossier du pilote assassiné, tout comme Israël a donné son accord au versement de compensations pour la mort des neuf turcs tués dans les heurts avec les troupes israéliennes au cours d’une tentative illicite de briser le blocus autour de la Bande de Gaza.

Une coopération israélo-turco-russe et de la bonne volonté au profit de leurs intérêts mutuels concernant la question du gaz peut aussi générer des efforts conjoints dans d’autres sphères également. Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres.

DEBKAfile Reportage Exclusif 27 juin 2016, 11:58 PM (IDT)