La Russie s’est mise le dos au mur en Syrie

L’usage des gaz chimiques par Assad met Poutine dans une situation embarrassante : Trump ou le régime syrien

Dans cette image fournie par la Navy américaine,, the guided-missile le destroyer USS Porter  à missiles guidés lance une attaque de missiles tomahawk verts le territoire syrien, depuis la Mer Méditerranée le 7 Avril 2017. U.S. Navy via AP

 

Il semble bizarre que les hasards de la relation entre les Etats-Unis et la Russie suivent les hauts et les bas de l’usage des armes chimiques en Syrie. En août 2013, après les horribles attaques au gaz Sarin lancées par l’armée syrienne sur l’Est de la Ghouta, qui ont assassiné plus de 1.500 personnes,le Président Obama avait presque failli (et finalement failli tout-à-fait) ordonner des frappes de missiles en Syrie, mais finalement accepté l’offre du Président Poutine de démanteler l’arsenal d’armes chimiques d’Assad sous supervision internationale.

Actuellement, Moscou et Washington sont, une fois encore, engagés dans un bras de fer, à la suite des frappes des missiles américains contre la Base aérienne syrienne de Shayhat, en représailles à ce qui semble bien être une nouvelle utilisation d’armes chimiques par  Assad, le 4 avril, dans les zones d’Idlib contrôlées par l’opposition. L’attaque a tué plus de 86 personnes,dont au moins 49 enfants.

Documents déclassifiés du Pentagone tendant à prouver de manière irréfutable, pour l’Amérique, la culpabilité indéniable du tueur en Syrie, Bachar El Assad

Les choses n’étaient pas censées se passer de cette façon. La lutte contre Daesh était supposée être le fruit mûr à cueillir, à la fois par les Etats-Unis et la Russie, afin de relancer leur relation sous la férule de Trump, un Président qui même exhibait une certaine volonté à travailler avec Assad afin de combattre le terrorisme. Quelques jours à peine avant cette attaque chimique, à la fois la Maison Blanche et le Secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson reconnaissaient essentiellement « la réalité politique du maintien au pouvoir d’Assad ». Moscou scrutait l’horizon afin de ré-engager les négociations avec les Etats-Unis autour de cette zone d’intérêts communs.

L’attaque chimique sur Idlib a tout bouleversé. Cela a provoqué un changement radical de la position personnelle de Trump sur la Syrie et Assad et déclenché une action militairev contre le régime syrien, afin de punir et de dissuader des attaques supplémentaires de ce genre difficiles à éviter. Trump a protégé ses arrières politiques en accusant à l’origine la « réplique faiblarde d’Obama » et la décision de ne pas sanctionner l’usage d’armes chimiques par Assad, en 2013 par des représailles utilisant des frappes de missiles.

Trump devait prouver sa fermeté en déclenchant une réplique militaire face à un acte horrifiant d’Assad, qui « franchissait bien trop de lignes rouges ». Le Secrétaire d’Etat Rex Tillerson a brutalement déclaré que la Russie et l’Iran portent une responsabilité morale dans la mort de ces civils au cours de l’attaque. De façon encore plus sinistre, il a appelé la Russie à reconsidérer son soutien à Assad, qui n’obtiendrait aucun rôle à l’avenir pour gouverner le Peuple Syrie,” et lui a même demandé d’ouvrir la porte à un changement de régime en Syrie, grâce à un « effort international ».

Tous ces points attestent d’un complet retournement des positions déclarées de Trump et d’une gifle majeure infligée aux espoirs de Moscou de remodeler entièrement ses relations avec Washington. Le Kremlin doit maintenant trouver la bonne stratégie pour maîtriser ce problème. Heureusement, il dispose de quelques options qu’il pourra mettre sur la table la semaine prochaine, quand Tillerson rencontrera Vladimir Poutine à Moscou.

La réaction première de la Russie à l’attaque chimique a été une défense absolue de la force aérienne d’Assad : elle avait bombardé une usine d’armes chimiques des rebelles. Ces mêmes rebelles avaient ensuite mis en scène des vidéos d’enfants mourant d’exposition au gaz sarin. C’était prévisible, mais malheureux. I l était aussi évident que Moscou a été pris par surprise par cette attaque. Les amis de la Russie en Syrie avaient « oublié » de l’avertir.

En réagissant à la frappe des missiles de Trump contre les forces aériennes d’Assad, la Russie s’est fortement appuyée sur la rhétorique de l’escalade, mais sa réponse semblait n’avoir que peu de substance. Moscou a estampillé cette frappe comme un acte d’agression contre un Etat souverain et suspendu un accord entre armées visant à éviter tout incident dans l’espace aérien syrien bondé par les avions de guerre. Par-dessus tout, cette réaction a été contre-productive. Après, la Russie a été prévenue par avance par les Etats-Unis, du fait même de cet accord, précisément.

Il se peut que la Russie augmente le nombre de ses systèmes de défense anti-aérienne en Syrie, pour rendre plus difficiles les opérations américaines en Syrie, mais cela ne changera pas grand-chose sur le terrain. Moscou semble comprendre qu’il s’agissait d’une attaque ponctuelle afin de faire la démonstration de la crédibilité des Etats-Unis dans sa volonté de faire appliquer les normes internationales vitales et projeter une image de force des Etats-Unis aux autres puissances.

La Russie reste encore ferme sur ses positions, dans sa défense unilatérale du régime syrien, mais cette fois-ci, Assad pourrait bien avoir surjoué sa partition. Il a manqué de respect envers son Parrain Poutine en le rendant impuissant en tant que garant de l’accord sur les armes chimiques avec Washington ou pire encore, complice d’Assad en trichant et en mentant sur la solidité de cet accord. Il a humilié Poutine face à Trump en faisant en sorte que Poutine passe pour le faible de l’histoire. C’est le genre d’affront que le leader russe n’a jamais, mais alors jamais pris à la légère.

Il y a un sentiment répandu parmi les acteurs russes qu’Assad a peut-être délibérément tenté de saborder le processus de paix d’Astana, dans lequel Moscou et Ankara ont investi beaucoup de leur potentiel et de leur crédibilité politique. Assad et Téhéran veulent obtenir une victoire militaire totale, et pas du tout un accord de partage des pouvoirs avec les rebelles vaincus. Assad et ses souteneurs iraniens n’ont jamais eu une si bonne opinion d’Astana et se sont montrés clairement irrités par la Russie et la Turquie qui agissaient comme les types qui orchestrent le spectacle.

Poutine attendra Tillerson avant d’évaluer s’il est préférable pour la Russie de punir Assad au profit de la poursuite du Grand Jeu avec Trump. Les cartes dont Poutine dispose sont meilleures, à présent, qu’en 2013, quand il se désespérait de ne pas pouvoir empêcher les frappes aériennes américaines, de façon à ne pas paraître impuissant à les arrêter. Ce qui change, par rapport à 2013, c’est que les Etats-Unis n’ont plus d’option militaire viable contre Assad et pas vraiment d’appétit à se lancer dans une offensive pour le renverser par la force. Les frappes étaient symboliques, ne changeant finalement pas grand chose sur le terrain. C’est ce qui sécurise les enjeux russes en Syrie.

Ce dont Moscou devrait s’inquiéter c’est si Trump va élargir les objectifs américains en Syrie, de sa focalisation sur la victoire contre Daesh, en optant pour une politique plus coûteuse visant à mettre un terme à la guerre civile en Syrie et à garantir un accord politique. Ce pourrait être très préoccupant pour Moscou que Trump le fasse tout en chargeant simultanément les Etats-Unis, au moyen de la coercition militaire, pour imposer des accords et des cessez-le-feu. Cela marginaliserait la Russie, mais nous n’en sommes pas encore là.

Pour peu que l’enquête de l’ONU sur cette attaque au gaz chimique mettre Damas en accusation, cela aurait du sens pour Poutine qu’il joue le rôle d’un véritable humanitaire. Une façon de le faire consisterait à punir comme il se doit Assad en clouant son armée de l’air au sol. La Russie dispose de suffisamment de puissance en défense aérienne déployée en Syrie pour le faire. Il n’y a plus de ville aussi importante qu’Alep à prendre, pour Moscou, aussi pourquoi ne pas forcer la main d’Assad et le rendre plus sensible à un accord négocié en limitant la gamme de ses options militaires possibles?

Cela, bien évidemment rendrait les Iraniens fous de rage. Mais ils continuent d’orchestrer leur propre spectacle derrière le dos de la Russie. L’Administration Trump et Israël veulent que la Russie prenne ses distances avec l’Iran et ses objectifs en Syrie. Quelle meilleure façon  de dire à Tillerson que la Russie ressent la douleur des Etats-Unis quand on aborde la question de l’Iran? Et, pour Israël, la Russievient tout juste de reconnaître l’Ouest Jérusalemcomme sa capitale, en jouant ainsi un des atouts de Trump et en l’incitant à couper par l’installation de son Ambassade.

Tillerson est sur le point de découvrir, la semaine prochaine, si le seul homme qui sache réellement danser le tango à Moscou sera d’humeur à le faire ou pas…

 

Adaptation : Marc Brzustowski

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madeleine

Comme tout le monde le sait, la présence de militaires IRANIENS est constante en Syrie, aux côtés officiellement de Bachar El Assad.
Se pourrait-il que, en excellents joueurs d’échecs qu’ils sont, les Iraniens soient derrière la Corée du Nord et ses essais de tirs nucléaires pour « occuper » Trump ET aussi derrière le bombardement à l’arme chimique, avec ou sans la complicité de El Assad, avec le but que les relations entre les USA et la Russie deviennent si mauvaises et sans autre issue que se « taper dessus », la victoire revenant à l’Iran désormais libre de mettre au point sa bombe nucléaire ? Les paroles de Libermann « Rohani pourrait être assassiné », allant peut-être dans le sens de ma question.

Marianne

Bein heureusement que ce n’est pas ce Moshe 007 que Dieu a envoyé pour sortir d’Egypte.

Il faut prendre un peu de hauteur et mieux analyser l’action de Poutine, qui est sûr, à l’encontre des intérêts de notre ami Khalil !!!

Bonne fin de Pessah……………………….

stevenl

What is good for Putin may not be good for Russia and vice versa!
Europe and the US could dramatically improve the economic situation of the Russian people!!!

Moshé_007

Khalil Hitti, je partage entièrement votre commentaire, d’accord et plus !

Poutine avec sa quincaillerie relookée par les maquilleuses des choeurs de l’armée russe va simplement s’écraser comme la merde qu’il est, d’ici peu, il n’aura d’autre choix que d’aller demander l’asile aux helvètes accueillant les centaines de milliards pillés aux peuples de cette Russie exsangue et prête à bondir !!

Un signe de faiblesse et son portrait va se diluer dans le fiel de l’histoire sombre de ce pays qui n’a jamais connu la démocratie !

Les événements vont se précipiter à une allure jamais observée !!!!!!

Avec ou sans missiles américains !!!

madeleine

Poutine est loin d’être un idiot, c’est un excellent stratège mais dénué de sensibilité. C’est un homme de cette envergure qu’il faudrait à la France.

Khalil Hitti

Cette analyse, comme toutes ses soeurs, manque de désigner l’essentiel, à savoir la nature totalitaire, de sous-nature gangstéro-oligarchique de l’entité « Russie » sous le règne du mafieux-en-chef Poutine.
Il est plus que clair que ce dernier a pris « de bien mauvaises habitudes » durant huit ans de vide sidéral et unique obamien. Poutine revient ici, tout simplement, à la dure réalité : Il n’est ni Machiavel ni Superman. A chaque pas en Syrie (après des « victoires » extrêmement faciles contre des milices sous-armées, privées d’appuis extérieurs et divisées entre elles), le guette la fosse.
Hardi, Kamarad Putin! Le chemin est encore long! Le nuage rose Obama est passé, voici l’ère Trump, chargée d’électricité… et de Tomahawks!