10 juin 2017 : des migrants au large de Lampedusa, en Italie, attendent d'être sauvés par l'équipage du navire Phoenix Migrant Offshore Aid Station (MOAS). (Photo de Chris McGrath / Getty Images)/Generated by IJG JPEG Library
  • Le gros des mouvements migratoires est encore à venir : la population africaine doublera au cours des prochaines décennies. L’Egypte comptera bientôt 100 millions de personnes et le Nigeria 400 millions. À l’époque du numérique, de l’Internet et des téléphones mobiles, tout le monde connaît notre prospérité et notre mode de vie. » – Gerd Müller, ministre allemand du Développement.
  • « Les jeunes ont tous des téléphones mobiles, ils savent ce qui se passe dans d’autres parties du monde, et cela agit comme un aimant ». – Michael Møller, directeur du bureau des Nations Unies à Genève.
  • « Si nous ne parvenons pas à résoudre les grands problèmes des pays d’Afrique, dix, vingt ou même trente millions d’immigrants débarqueront dans l’Union européenne au cours des dix prochaines années ». – Antonio Tajani, président du Parlement européen.
L’Espagne s’apprête à supplanter la Grèce au rang de seconde porte d’entrée par voie maritime des migrants en Europe. Ce soudain déplacement des flux migratoires en direction de l’Espagne est la conséquence de la répression accrue des trafiquants de migrants sur la route maritime Libye-Italie qui était auparavant le principal circuit d’acheminement des migrants vers l’Europe.

Ce déplacement vers l’ouest de flux migratoires qui ont ciblé d’abord la Grèce puis l’Italie, fait de l’Espagne le prochain épicentre de la crise migratoire européenne. L’Espagne n’est séparée de l’Afrique que par un bras de mer de 16 kilomètres seulement.

Plus de 8 300 migrants clandestins ont atteint les côtes espagnoles au cours des sept premiers mois de 2017, soit trois fois plus qu’en 2016, indique l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Des milliers de migrants ont déjà pénétré en Espagne par les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla situées sur la côte nord du Maroc. Ceuta et Melilla, sont les seules frontières terrestres de l’Union européenne avec l’Afrique. Une fois-là, les migrants sont logés dans des abris temporaires, puis transférés en Espagne. Nombreux sont ceux qui, ensuite, continuent leur périple vers d’autres régions d’Europe.

Au total, 12 000 migrants environ sont arrivés en Espagne sur les premiers mois de 2017, contre 13 246 en 2016. En comparaison, 14 156 migrants sont arrivés en Grèce sur les sept premiers mois de 2017.

L’Italie demeure encore la principale porte d’arrivée des migrants en Europe, avec environ 97 000 entrées sur les premiers mois de 2017, contre 181 436 pour l’ensemble de 2016. Depuis l’accord signé en mars 2016 entre l’UE et la Turquie, la route qui va de la Turquie à la Grèce a été fermée. L’Italie est alors devenue le premier point d’entrée des migrants en Europe, et le principal point d’entrée des migrants en provenance d’Asie et du Moyen-Orient. Près de 600 000 migrants ont atteint l’Italie au cours des quatre dernières années.

Un meilleur financement des gardes côtes libyens a également été institué et des milliers de migrants en partance pour l’Italie ont été bloqué sur les côtes libyennes. Cette répression a réorienté les flux de migrants vers des routes alternatives en Méditerranée. D’où l’augmentation du nombre de migrants débarquant en Espagne.En mai, l’Italie a signé un accord avec la Libye, le Tchad et le Niger pour améliorer les contrôles aux frontières et freiner le flux des migrants qui traversent la Méditerranée. En juillet, l’Italie a également conclu un accord avec la France et l’Allemagne pour mieux règlementer les associations humanitaires qui exploitent des bateaux en Méditerranée.

Le 14 août, Frontex, l’agence frontalière de l’Union européenne, a signalé qu’entre juin et juillet 2017, le nombre des migrants africains arrivant en Italie à partir de la Libye a diminué de plus de la moitié. Les 10 160 migrants arrivés par mer en Italie en juillet étaient moins nombreux de 57% par rapport à juin ; il s’agit du niveau d’arrivées le plus bas pour le mois de juillet depuis 2014.

Sur la même période, le nombre de migrants arrivant en Espagne a fortement augmenté. Selon Frontex, 2 300 migrants ont mis le pied en Espagne en juillet, soit quatre fois plus qu’en juillet de l’année précédente. La plupart des migrants qui arrivant en Italie et en Espagne sont considérés comme des migrants économiques à la recherche d’une vie meilleure en Europe, et non comme des réfugiés qui fuient des zones de guerre.

« La grande majorité des migrants en partance pour l’Italie au départ de la Libye sont originaires du Sénégal, de la Gambie, de la Guinée et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest », a déclaré Joel Millman, porte-parole de Organisation internationale pour les migrations (IOM), au Financial Times . « Compte tenu de la répression qui sévit aujourd’hui en Libye, il semble naturel que les migrants abandonnent le dangereux dessert [sic] de la Libye et optent pour une traversée par le Maroc ».

Julio Andrade, conseiller municipal de Málaga, une ville portuaire du sud de l’Espagne, a surnommé le phénomène « l’effet ballon ». Dans un entretien accordé à l‘Irish Times, il a déclaré: « Si vous pressez un coin du ballon, l’air est propulsé ailleurs. Les pressions policières et les arrestations dans les circuits méditerranéens visant la Grèce et l’Italie, incitent les mafias à chercher d’autres routes. »

Les autorités espagnoles ont signalé une recrudescence du nombre des migrants africains qui tentent d’atteindre Ceuta en passant par-dessus des clôtures hautes de six mètres et surmontées d’un fil tranchant comme un rasoir. Le ministre espagnol de l’Intérieur, Juan Ignacio Zoido, a déclaré que 2 266 tentatives de franchissement de frontière avaient eu lieu à Ceuta au cours des sept premiers mois de 2017, contre 3 472 tentatives en 2016.

Le 7 août, plus de 300 Africains – majoritairement en provenance d’Afrique subsaharienne – ont tendu une embuscade aux forces de sécurité espagnoles et marocaines avant de prendre d’assaut le passage frontalier à El Tarajal ; 186 migrants ont pu arriver en territoire espagnol. Le 8 août, plus d’un millier de migrants armés de lances et de cailloux ont tenté le même passage en force. Le 9 août, les autorités espagnoles ont fermé la frontière pendant une semaine. Le 10 août, environ 700 migrants ont à nouveau pris d’assaut la frontière ; 200 migrants ont été arrêtés.

Parallèlement, le 9 août, une vidéo a révélé qu’un canot pneumatique chargé de dizaines de migrants avait accosté sur une plage de Cadix remplie d’estivants en maillot de bain. José Maraver, chef d’un centre de sauvetage de la ville voisine de Tarifa, a déclaré au Telegraph qu’un deuxième bateau avait accosté une autre plage de la région et que ces évènements n’avaient plus rien d’inhabituel. « Chaque jour, il y a des bateaux, chaque jour il y a des migrants », a-t-il déclaré. « La situation devient très compliquée ».

Les migrants font preuve d’imagination pour se rendre en Espagne. Le 6 août, quatre marocains ont atteint la côte de Málaga en jet ski. En juillet et août, la police a intercepté au moins deux douzaines de migrants qui tentaient de rejoindre l’Espagne en jet ski. Le 10 août, la police a trouvé, à l’aide de détecteurs de mouvement et de capteurs d’images thermiques, 56 migrants, dont 14 enfants, cachés à l’intérieur de camions au départ de Ceuta vers le port d’Algesiras.

Le 9 août, le journal espagnol El País a reconnu dans un éditorial qu’il était « évident que la pression migratoire s’était déplacée vers la Méditerranée occidentale et que rien ne permettait de penser que la situation évoluerait différemment dans un proche avenir ». Il a ajouté:

« La pression migratoire enregistrée ces dernières semaines déborde déjà tous les dispositifs de surveillance et de contrôle. L’entrée massive de personnes en provenance d’Afrique subsaharienne qui sautent par-dessus la clôture de Ceuta, ou qui traversent la frontière d’El Tarajal, montre la difficulté qu’il y a à stopper l’entrée de ceux qui fuient la guerre, la famine ou les difficultés économiques …
« La gestion des flux migratoires nécessite une politique européenne forte et des ressources économiques en proportion. L’Espagne ne peut rester seule gardienne du sud de l’Europe ».

Le ministre allemand du Développement, Gerd Müller, a récemment déclaré que l’Europe devait se préparer à l’arrivée de millions de migrants en provenance d’Afrique :

« Le gros des mouvements migratoires est encore à venir : la population africaine va doubler dans les prochaines décennies. L’Egypte passera à 100 millions d’habitants et le Nigeria à 400 millions. À l’époque du numérique, de l’Internet et des téléphones mobiles, tout le monde connaît notre prospérité et notre mode de vie. »

Le directeur de l’Office des Nations Unies à Genève, Michael Møller, a répondu en écho à ces préoccupations:

« Ce à quoi nous avons assisté est l’une des plus grandes migrations humaines de l’histoire. Et cela va s’accélérer. Les jeunes ont tous les téléphones portables et ils savent ce qui se passe dans d’autres parties du monde. Cela agit comme un aimant ».

Le président du Parlement européen, Antonio Tajani, a déclaré que pour faire face aux flux migratoires, l’Union européenne devra investir des milliards et élaborer une stratégie de stabilisation de long terme de l’Afrique :

«Si nous ne parvenons pas à résoudre les problèmes qui se posent aux pays africains, dix, vingt ou même trente millions d’immigrants se rendront dans l’Union européenne au cours des dix prochaines années».

Soeren Kern est senior fellow de l’Institut Gatestone, basé à New York .

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