L’accord Trump-Poutine met en péril les frontières israélienne et jordanienne

 

La transformation d’un petit coin de terre entre les frontières syrienne, israélienne, jordanienne et irakienne progresse rapidement sans soulever plus d’intérêt que cela – même en Israël,où cela pourrait finir par provoquer le plus de problèmes, selon Debkafile.

Mercredi 8 août, deux compagnies de l’armée russe composées d’hommes de troupe Ingouches, provenant du Nord du Caucase, ont installé un poste de commandement dans le village syrien deTal al-Shahm, à 13 kms de la frontière syrienne. Son commandant, le Colonel Alexei Kozin, a ainsi pris en charge la frontière de la Syrie avec Israël. Comme Debkafile l’a révélé le mois dernier, sa mission est de mettre sur pied dix checkpoints de contrôle tout le long de cette frontière.

Cette zone frontalière est conçue comme l’une des quatre zones de désescalade qui ont fait l’objet d’un accord entre les Président Donald Trump et Vladimir Poutine, lors de leur réunion à Hambourg, le 7 juillet.

Selon le cadre d’entente auquel sont parvenus Washington, Moscou et Jérusalem, la Force de Séparation et d’observation de l’ONU (UNDOF) reviendra sur sa base de Fawar, en face de Quneitra pour faire tampon entre Tsahal et les forces russes. Mais l’histoire passée de cette « force » dans ce rôle entre Tsahal et les forces syriennes n’a jamais exactement su se montrer très impressionnante [et au Liban, c’est encore pire].

Le Ministre russe des Affaires étrangères Sergeï Lavrov a contribué à apporter un moment de diplomatie en conformité avec ce processus, vendredi 11 août. Il a apporté l’assurance que la Russie prendrait en compte les intérêts d’Israël à Jérusalem, dans le cadre des négociations de paix entre Palestiniens et Israéliens.

Cela s’inscrit aussi dans le communiqué surprenant de Washington, le même jour, précisément que Donald Trump, bien qu’en plein milieu d’une crise redoutable avec la Corée du Nord,  pleines de surenchères militaires, prévoit d’envoyer son principal conseil et gendre Jared Kushner et le médiateur de paix palestino-israélienne Jason Greenblatt en visite préparatoire anticipée, afin de poursuivre leur mission.

Pour comprendre comment ces différentes pièces disparates s’insèrent dans le puzzle du tableau général, tournons-nous à 70 kms à l’Est de Quneitra, situé sur le Golan syrien, vers les combats qui se déroulent à Suweida, dans le sud-Est druze de la Syrie, jusqu’en face des frontières jordanienne et irakienne. Les troupes russes sont entrées dans la ville centrale de Dera’a, qui jouxte la frontière jordanienne, le 13 juillet. Comme à Quneitra, un mois plus tard, ils ont mis sur pied des postes de commandement afin de  surveiller la première zone de désescalade ou de cessez-le-feu qui devait être organisée dans le cadre de l’accord de Hambourg.

La consigne que les troupes russes étaient censées exécuter devait stopper les combats à cet endroit et procéder au retrait des forces combattantes : l’armée syrienne, l’Iran et ses milices chiites supplétives, dont le Hezbollah, à une distance de 40 kms de la frontière.

Mais cet arrangement n’a jamais tenu.

Près de quatre semaines plus tard, le mercredi 9 août au soir, la même nuit où les troupes russes entraient à Quneitra, l’armée syrienne et le Hezbollah lançait une offensive majeure, sur deux fronts, dans la province de Suweida. Trois jours plus tard, samedi, ils ont contraint les forces rebelles locales, notamment le Jaish al-Ashair, soutenu par la Jordanie, à battre en retraite et se sont emparés de 57 kms de frontière du sud de la Syrie avec le royaume Hachémite.

Pas plus les Russes que les Américains n’ont interféré dans cette offensive menée par l’armée syrienne et le Hezbollah, bien que les Russes aient soit-disant pris la responsabilité de maintenir le cessez-le-feu et que les forces spéciales américaines étaient et sont encore postés à l’Est de Suweida, dans le triangle d’Al-Tanf où se croisent les frontières syrienne, jordanienne et irakienne.

(Voir les cartes ci-dessous)

Selon les sources militaires de Debkafile, l’offensive de l’armée syrienne et du Hezbollah viole cet accord de cessez-le-feu sur la zone dite de déconfliction du Sud de la Syrie. Les groupes rebelles syriens, comme le Jaish al-Ashair, soutenus par les Etats-Unis et la Jordanie, se sont enfuis, en pleine débandade et sans tirer un seul coup de feu, se sont rendus au camp du régime syrien en remettant leurs armes fournies par les Etats-Unis aux combattants de l’armée syrienne et du Hezbollah terroriste.

L’épisode de Suweida a démontré de quelle manière l’alliance entre la Syrie, l’Iran et le Hezbollah creuse son sillon en exploitant l’écran de fumée des zones de cessez-le-feu tracées par Trump et Poutine comme une porte grande ouverte afin de prendre le contrôle du Sud de la Syrie et s’emparer des frontières jordanienne et israélienne.

Le mouvement rebelle syrien se désintègre à une allure alarmante, à la suite du « tremblement de terre Jubeir » – comme on a surnommé cet autre événement capital que les gros titres des médias occidentaux et israéliens ont choisi d’ignorer.

La semaine dernière, certaines sources ont révélé que le Ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir aurait informé les dirigeants de l’opposition syrienne invités à Riyad que son gouvernement retirait son soutien à leurs milices combattantes, à la suite de la décision du Président Donald Trump de réduire l’action militaire américaine en Syrie et de la concentrer uniquement sur la guerre contre Daesh – et par conséquent, mettre un terme à la résistance américaine contre le régime Assad.

Saudi officials did not deny the report, only termed it “inaccurate.”

Les responsables saoudiens n’ont pas démenti ces reportages, en les qualifiant simplement « d’inexacts »

[NDLR : le journal égyptien egypttoday.com, cependant, livre une version totalement différente de ces réunions de l’opposition à Riyad, en démontrant qu’Al-Jubeir a essentiellement mis hors-jeu tous les coordinateurs et dirigeants syriens inféodés au Qatar. Cette action s’inscrit dans le cadre du boycott généralisé contre cet émirat gazier. Al Jubeir a aussi mis en garde la Turquie contre ses interférences dans la crise entre les pays sunnites et le Qatar, en invitant les Kurdes à ces pourparlers visant à préparer les prochaines étapes de négociation avec les représentants du régime syrien. Cette posture combative d’Al Jubeir, à l’encontre de l’influence délétère du Qatar et de la Turquie au sein de l’opposition syrienne ne rend pas compte d’un discours défaitiste, même de coulisse, à l’égard des groupes rebelles, qu’il doit plutôt mobiliser dans le cadre de ce bras-de-fer contre les parrains de la confrérie des Frères Musulmans en Syrie. En tout état de cause, nous resterons prudent en disant que cette réunion elle-même ne serait pas la cause principale d’un esprit défaitiste, si tel est le cas, se répandant parmi les rebelles]

Mais, pendant ce temps, l’écho des décisions de Riyad et de Washington d’abandonner la cause anti-Assad s’est répandu comme une traînée de poudre parmi les groupes rebelles syriens. Beaucoup ont répondu en déposant les armes et en se rendant.

Le sort du mouvement rebelle après six ans de guerre cruelle contre le dictateur Bachar el Assad devrait constituer un cas d’école pour les autres destinataires des promesses américaines et russes. Par conséquent, la promesse de Lavrov de prendre en considération les intérêts d’Israël à Jérusalem devrait être prise avec une extrême prudence. Il avait probablement en ligne de mire d’apaiser le scepticisme israélien quant à la perspective de troupes russes qui maintiendraient à bonne distance de sa frontière nord les troupes syriennes, iraniennes et du Hezbollah -même si Washington, a souscrit à cette promesse.

Plutôt que de prendre les eux grandes puissances au mot, Israël n’a seulement besoin que d’observer ce qui se passe au cours de ces toutes dernières heures juste de l’autre côté de la frontière à Suweida, pour apprécier la valeur de ces promesses qui ne valent que pour ceux qui les écoutent.

Tôt ou tard, le modèle de Suweida sera dupliqué à Quneitra. Ni les troupes russes encore moins les casques bleus de l’ONU de ne se battront pour empêcher que cela se produise.

D’ici là, les groupes rebelles syriens, dont ceux pour qui Israël a investi depuis des années, en les considérant comme maintenant une zone-tampon contre les forces hostiles syriennes, iraniennes et du Hezbollah, se seront déjà effondrés. Désavoués par leurs soutiens saoudiens, ils risquent d’être écrasés par le rouleau compresseur de la « désescalade » américano-russe. Israël comme la Jordanie découvrira bientôt trois forces hostiles siégeant jusque de l’autre côté de sa frontière, bien trop près pour assurer sa sécurité.

 

DEBKAfile Analyse Exclusive, 12 août 2017, 5:12 PM (IDT)
Adaptation : Marc Brzustowski : il y a toujours au moins deux scénarios possibles. Une des meilleures garanties de ne pas se laisser surprendre consiste à se faire l’avocat du diable

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madeleine

Ne jamais faire confiance à des dirigeants arabes. Je pense que les Israéliens en sont conscients. Israël, s’il a compris le « topo » qui se prépare, serait peut-être avisé de faire une guerre préventive en tapant sur cette région située aux trois frontières, suivant le précepte de Napoléon : « pour gagner une guerre il faut attaquer en premier ».
Je n’ai aucune confiance en la parole de Poutine, rusé comme un renard. Quant à Trump, il me semble dépourvu de la « vision » tellement nécessaire en matière de politique. Lunatique, il donne l’impression de tenter de « reboucher », paniqué, les trous d’un mur lézardé de partout et en train de s’écrouler. Il reste à espérer que Natanyahu, usé, puisse établir une coalition de politiques, y compris ceux de l’opposition, qui comprennent que l’instant est grave, et que, comme on dit, « l’union fait la force », parce que de la force il va falloir en avoir, face à ce qui se prépare contre Israël isolé. Il serait intéressant à cet égard de connaître l’avis du Président de l’Inde en la matière, et de savoir jusqu’où, si besoin est, il serait peut-être près à s’engager aux côtés d’Israël pour ce combat.