L’ONG Transparency Watch évalue à 50 millions le nombre de personnes ayant payé un bakchich pour accéder à un service public. Parmi les neuf pays étudiés, Liban et Yémen sont particulièrement visés.

En 2011, Mohamed Bouazizi s’immolait par le feu pour protester contre la corruption de la police locale. Le sacrifice de ce vendeur de fruits tunisien avait été l’étincelle mettant le feu aux printemps arabes. Cinq ans après, où en est la corruption dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord? Un rapport de l’ONG Transparency Watch dresse un constat dramatique: en 2015 presque une personne sur trois déclare avoir payé un bakchich pour accéder à un service public dans les neuf pays passés au crible par l’association: le Maroc, l’Égypte, l’Algérie, le Soudan, la Tunisie, la Jordanie, la Palestine, le Yémen, et le Liban. Soit 50 millions de personnes ayant eu recours à un pot-de-vin dans l’année 2016.

Manifestation en mars dernier au Liban contre la corruption. 92 % des Libanais pensent que la corruption a augmenté dans leur pays récemment.

Cette enquête menée auprès de 10.797 adultes du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, revèle une aggravation récente, tant dans la perception que dans les faits, de la corruption. Les hommes sont plus touchés que les femmes: un tiers d’entre eux affirment avoir dû recourir à la corruption, contre un quart des femmes. Les collecteurs d’impôts, les membres du parlement, les hommes politiques sont perçus comme les plus corrompus. Les leaders religieux sont un peu moins blâmés, mais 19 % de la population les perçoit comme corrompus. Les lieux où se pratiquent le plus régulièrement la corruption sont les tribunaux, où une personne sur trois doit payer un bakchich. Un quart des personnes interrogées dit avoir dû recourir à un pot-de-vin auprès de la police. Mais la corruption touche aussi les écoles et les hôpitaux. L’ONG donne l’exemple de Kamal, père de famille marocain, qui a dû payer une somme exorbitante à une infirmière pour que sa fille aveugle puisse bénéficier d’un scanner du cerveau. Il a finalement porté plainte, et l’infirmière a été condamnée à deux mois de prison. Preuve, selon l’ONG, que les recours sont possibles et que la corruption peut être combattue pour peu que la parole se libère. Mais, note l’association, 30 % des personnes interrogées ayant pratiqué la corruption disent craindre des représailles si elles portent plainte.

«C’est comme si les printemps arabes n’avaient jamais existé»

L’ONG déplore le peu d’évolution dans les régimes de la région. «La colère publique contre des leaders et des régimes corrompus a été un catalyseur clé pour le changement au Moyen-Orient et dans le Nord de l’Afrique, notamment avec les printemps arabes. Mais, cinq ans après le début des révolutions, notre baromètre de la corruption montre qu’il existe toujours un très large mécontentement populaire quant aux efforts des gouvernements de lutte contre la corruption. Plus inquiétant, une large majorité de la population (61 %) perçoit une augmentation récente de la corruption». «C’est comme si les printemps arabes n’avaient jamais existé», déplore José Ugaz, président de l’ONG.

Le Figaro

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