Assad fait fi des règles de précaution, et Israël fixe sa ligne rouge

Photo : Des soldats Israéliens patrouillent près de la frontière avec la Syrie, après que des projectiles, tirés depuis le territoire de ce pays déchiré par la guerre, aient atterri  du les Hauteurs du Golan côté israélien, le 24 Juin 2017
Jalaa MAREY (AFP)
Il est impossible de savoir pour l’instant si l’incident d’hier sur le plateau du Golan est terminé

L’armée syrienne dans le secteur de Kuneitra était hier (samedi) prise de panique. Certains groupes rebelles syriens basés dans les villages proches de la frontière avec Israël ont lancé une offensive contre des zones qu’elle contrôle.

La région orientale de Kuneitra est particulièrement importante pour le régime car elle permet de contrôler la route stratégique qui relie Damas, la frontière jordanienne et la ville de Daraa. Celui qui contrôle cette route peut facilement se diriger vers la capitale syrienne.

Si les rebelles réussissent à prendre cette route et la zone qui la contrôle, ils pourront saboter les projets du régime d’Assad, qui œuvre actuellement avec le Hezbollah et les forces iraniennes pour reprendre la ville de Daraa, qui est la clé de contrôle du sud-est de la Syrie et de la frontière jordanienne.

Un tank ciblé par l’armée de l’air israélienne en Syrie en riposte à 10 projectiles tirés en direction du Golan le 24 juin 2017
Armée israélienne

Dans ce contexte, il faut rappeler qu’une grande partie de l’approvisionnement des rebelles en Syrie vient de Jordanie, et Daraa est le lieu où le soulèvement contre le régime Assad a commencé, il y a près de six ans.

Ceux qui ont attaqué cette région qui se trouve aux mains de l’armée syrienne, à l’est de Kuneitra étaient des groupes islamistes salafistes, dirigés par une organisation affiliée à Al-Qaïda appelée « coalition pour la libération d’Al-Sham », qui n’est autre que l’ex- Front al-Nosra. L’attaque a été menée avec d’autres groupes d’insurgés islamistes, et elle menace de réduire la zone sous contrôle de l’armée syrienne près de l’axe stratégique qui mène à Damas.

Il est important de connaître ces données pour comprendre pourquoi l’armée syrienne a fait fi de toutes les règles de précaution et a tiré sur les rebelles qui l’ont attaquée, sans tenir compte du fait que des obus puissent « se perdre sur le territoire israélien ».

En général, l’armée syrienne essaie d’éviter les tirs vers Israël parce qu’elle connaît la vitesse de réaction d’Israël, ainsi que sa politique : pas de tir ni toute autre violation de la souveraineté de son territoire, sous peine de riposte conséquente.

La politique d’Israël découle de la conscience du fait que, sans une réponse musclée à tout dérapage de son territoire, même sans le vouloir, de tels faits seront interprétés comme une violation de sa souveraineté, ce qui aura pour conséquence l’affaiblissement de la dissuasion de l’Etat hébreu sur le plateau du Golan.

Israël s’applique donc à répondre dans de telles situations afin de rappeler l’existence d’une ligne rouge qu’on ne peut pas franchir. Les Syriens le savent et l’armée syrienne fait tout ce qu’elle peut pour éviter les tirs en direction d’Israël afin d’éviter les ripostes israéliennes qui peuvent venir de ses avions, de ses missiles, ou encore de ses tanks au sol.

Après avoir compris que la Syrie était susceptible de réagir à la manœuvre de Tsahal, Israël a évacué par précaution, les agriculteurs et les touristes dans la région, estimant qu’un embrasement était possible.

La possibilité d’une réponse existera toujours, et l’armée israélienne agit en conséquence. L’armée syrienne est bien consciente du fait qu’elle est inférieure à Israël sur le plateau du Golan, aussi bien dans les airs que sur terre. Par conséquent, elle respecte (généralement) la ligne rouge fixée par Israël.

Picture taken from the Israeli-annexed Golan Heights shows smoke billowing from the Syrian village of Quneitra during fighting between forces loyal to Syrian President Bashar Assad and rebels, near the Quneitra border crossing on August 31, 2014
Menahem Kahana (AFP)

L’incident d’hier était anormal à deux points de vue : d’une part, ce sont dix obus de mortiers et de chars qui ont explosé dans une zone non-habitée en Israël, ce qui est atypique.

Habituellement, quand un tel incident se produit, il est fait état du tir d’un obus de mortier ou deux. Or, hier, ce sont des tirs de chars qu’Israël a essuyés, sachant que les tireurs savaient très bien qu’ils allaient frapper le territoire israélien.

Par ailleurs, des milliers de touristes israéliens se trouvaient hier sur le plateau du Golan au moment des incidents, et auraient pu être touchés par les tirs. Les Syriens qui observent constamment notre territoire étaient au courant, ou auraient dû être au courant de leur présence. C’est aussi la raison pour laquelle la riposte d’Israël et l’offensive de ses avions de chasse ont été particulièrement vigoureuses.

L’opposition syrienne soutient que l’attaque a été menée par un hélicoptère, et qu’elle a détruit deux chars, ainsi qu’un poste de tir dans la région de Kuneitra.

Une source officielle syrienne de l’armée a indiqué que l’attaque israélienne a tué plusieurs personnes. Ce n’est pas encore clair, et il est impossible de savoir si cet incident est terminé. D’abord, parce que les rebelles attaquent encore l’armée syrienne et ont fait explosé les lignes à plusieurs endroits.

Ensuite, parce que les Syriens en général ne répondent pas immédiatement, mais attendent, évaluent, prennent une décision, et finissent par consulter dans certains cas les Russes et les Iraniens.

Voilà pourquoi les prochains jours seront cruciaux.

Ron Ben-Yishai est correspondant de guerre et analyste de la défense. Cet article est publié avec l’aimable autorisation de Ynet.

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