Amour, trahisons, pouvoir… Dans « Un milliard de secrets » qui paraît aux éditions Robert Laffont, Marie-France Etchegoin (Nouvel Observateur) dévoile les dessous de la famille Bettencourt. En voici un premier extrait.
Quel est le secret de François-Marie Banier ? Comment s’est-il introduit au cœur de l’une des plus grandes fortunes de France ? Dans son enquête, nourrie de nombreux documents inédits, Marie-France Etchegoin révèle avec quelle maestria le photographe a su surfer sur les névroses familiales et exploiter un passé douloureux : le père de Liliane Bettencourt, Eugène Schueller, fondateur de l’Oréal, a été un ultra de la collaboration.

Son mari André, ancien ministre, a écrit des articles violemment antisémites avant de s’engager dans la Résistance.

Sujet sensible

A la génération suivante, Françoise, la fille de la milliardaire, semble avoir voulu expier les fautes du père et du grand père : elle a épousé Jean-Pierre Meyers, le petit-fils d’un rabbin exterminé à Auschwitz.

Banier a fait son miel de cette généalogie compliquée. Un sujet ô combien sensible chez les Bettencourt comme en témoigne cette scène.

Nous sommes au 18, rue Delabordère, à Neuilly-sur-Seine. Liliane Bettencourt discute comme à son habitude avec son gestionnaire de fortune, Patrice de Maistre. Extrait.
 
« Le gestionnaire de fortune : On vous a regrettée, hier soir. La chorale était magnifique… C’était plein. J’étais à côté de votre petit-fils…

La milliardaire : Il y avait sa mère ?

Le gestionnaire de fortune : Oui, elle m’a dit, en me montrant son invitation où il y avait marqué « Mme Meyers » : Ce n’est pas gentil de ne pas mettre le nom complet, « Mme Bettencourt-Meyers ». J’ai eu envie de lui dire : Je ne suis pas secrétaire, désolé. Mais votre petit-fils, c’est la première fois que je le voyais… Je l’ai trouvé bien…

La milliardaire : Grand ?

Le gestionnaire de fortune : Oui.

La milliardaire : Et distingué ?

Le gestionnaire de fortune : Oui.

La milliardaire : Pas trop juif ?

Le gestionnaire de fortune : Physiquement, avec ses lunettes… il est un peu… bon, mais quand il s’exprime…

La milliardaire : Mais ses lunettes, il faut bien qu’il les porte.

Les secrets de famille n’ont souvent de secret que l’apparence. Ils restent cachés parce qu’ils sont simplement trop déplaisants pour être regardés. En 1991, alors que le scandale du « L’Oréal parallèle » éclate (1) , François-Marie Banier réalise que l’ombre du passé pèse sur les Bettencourt encore plus qu’il ne l’avait imaginé jusque là.

En particulier sur les relations entre la mère et la fille, même si  ces « choses là » n’ont longtemps été effleurées qu’à demi-mots. « Un jour, tu m’as beaucoup blessée. Tu m’as dit que je n’aimais pas Jean-Pierre parce qu’il était juif » écrira, beaucoup plus tard, Liliane à Françoise.
 
Destins contraires
 
Françoise, la petite fille du cagoulard antisémite, Eugène Schueller,  a en effet épousé un juif,  Jean-Pierre, lui même petit- fils d’un héros assassiné à Auschwitz, Robert Meyers. Un raccourci qui dit à lui seul la détermination de Françoise quand elle a choisi son époux. (…)

Comment une union entre deux êtres issus de familles aux destins si contraires aurait-elle pu être simple ? Pour Liliane Bettencourt, qui idolâtre son père, il y a dans le choix de Françoise une forme de défi et le rejet explicite d’une partie de l’histoire familiale  (…)
 
Mésalliance
 
Pour les intimes de la milliardaire comme pour les proches du couple, il ne fait aucun doute que Liliane Bettencourt a rêvé d’un autre mari pour sa fille. « Pour elle, ce mariage est une chose épouvantable. Une mésalliance » (…).

Avant le mariage, l’héritière n’en a pas fait mystère  Elle revendique ce droit élémentaire des belles-mères, quelles que soient les origines de son gendre. « J’ai été très entourée de juifs dans ma vie affective. Tu as dû même t’en rendre compte ! » se défendra-t-elle plus tard dans une lettre à sa fille. (…) 

Est-ce un hasard si la  bonne fortune de François-Marie coïncide avec la mise au pilori d’Eugène, puis d’André Bettencourt ?  C’est au milieu des années 90, alors que la face grimaçante de Schueller ressurgit et que l’antisémitisme « juvénile » de son mari est découvert, que l’héritière commence à couvrir l’artiste d’or. »

(1) en 1991, on découvre qu’Eugène Schueller a embauché, après guerre, ses anciens amis « cagoulards » ou « collabos » chez l’Oréal.

« Un milliard de secrets« , de Marie-France Etchegoin, aux éditions Robert Laffont.

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Ratfucker

Les journalistes « degauche » restent singulièrement muets sur les renvois d’ascenseur entre le clan des cagoulards Schueller Bettencourt, et les habiles qui ont su retourner leur veste suffisamment tôt: François Mitterrand, Jean Védrine, Claude Bourdet. Sauvés du peloton d’exécution à la Libération, les collabos de haut vol, Bousquet en tête, ont rapidement su prendre en marche le train de la 4° République, en se montrant reconnaissants envers leurs sauveurs. Cela s’est traduit, pour Mitterrand, pendant sa traversée du désert, par des emplois fictifs dans des filiales de l’Oréal, par le financement discret de son hôtel rue de Bièvre (alors qu’en dehors de la politique, il n’a jamais exercé de métier rémunérateur), par un soutien non moins discret à ses campagnes électorales. Ces épisodes méconnus sont décrits dans le détail dans le livre de Michel Bar-Zohar, (éd. Fayard) « Une Histoire sans fard – L’Oreal, Des années sombres au boycott arabe ». Ce livre est hélas introuvable, tous les exemplaires ayant été récupérés par le service com de l’Oréal et les Renseignements Généraux. Seule la traduction anglaise reste disponible.