Sandro Magister, dans un article de l’Espresso repris en français par E.S.M. (traduction de Charles de Pechpeyrou) écrit notamment (extraits) : « Les autorités de l’Eglise (…) sont sensibles aux dangers (…) que l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne pourrait comporter : non pas une intégration bénéfique de la Turquie dans l’Europe, mais une « catastrophe » pour un continent qui a abdiqué son identité chrétienne.

Le mot « catastrophe » figure dans le titre d’un livre qui est la synthèse la plus efficace de ces objections. Paru cette année en Italie, il a pour auteur Roberto de Mattei, historien, vice-président du Conseil National de la Recherche et directeur de la revue « Radici Cristiane », Racines Chrétiennes. Intitulé : « La Turquie en Europe : bienfait ou catastrophe ? », il choisit nettement la seconde hypothèse. En effet les précédents historiques ne sont pas encourageants. La Turquie actuelle a été l’une des zones les plus importantes du christianisme des premiers siècles et elle gardait encore au début du XXe siècle, après des siècles de domination ottomane, de fortes traces de son identité chrétienne, avec de nombreux fidèles. En quelques décennies, même ces traces ont été presque anéanties par la pression conjointe du laïcisme forcené d’un Kemal Atatürk et de la renaissance islamiste enfin parvenue au pouvoir avec Erdogan.

Benoît XVI est pleinement conscient de ces dangers. Quand il s’est rendu en Turquie, en novembre 2006, cela faisait à peine quelques mois qu’un prêtre catholique, Andrea Santoro, avait été frappé à mort par un islamiste fanatique alors qu’il priait à genoux dans la petite église de Trabzon. Pendant son voyage en Turquie, Benoît XVI n’a pas dit un mot à propos de l’entrée de ce pays dans l’Union Européenne (…) rien ne fait penser que Joseph Ratzinger ait atténué, comme pape, les fortes réserves qu’il avait exprimées sur ce sujet avant d’être élu successeur de Pierre. Ratzinger s’était exprimé à ce sujet dans deux interventions pendant l’été 2004.

La première est une interview accordée à Sophie de Ravinel pour “Le Figaro Magazine” du 13 août : “L’Europe est un continent culturel et non pas géographique. C’est sa culture qui lui donne une identité commune. Les racines qui ont formé et permis la formation de ce continent sont celles du christianisme. (…) Dans ce sens, la Turquie a toujours représenté un autre continent au cours de l’histoire, en contraste permanent avec l’Europe. Il y a eu les guerres avec l’Empire byzantin, pensez aussi à la chute de Constantinople, aux guerres balkaniques et à la menace pour Vienne et l’Autriche. Je pense donc ceci : identifier les deux continents serait une erreur. Il s’agirait d’une perte de richesse, de la disparition du culturel au profit de l’économie. La Turquie, qui se considère comme un État laïc, mais sur le fondement de l’islam, pourrait tenter de mettre en place un continent culturel avec des pays arabes voisins et devenir ainsi le protagoniste d’une culture possédant sa propre identité, mais en communion avec les grandes valeurs humanistes que nous tous devrions reconnaître. Cette idée ne s’oppose pas à des formes d’associations et de collaboration étroite et amicale avec l’Europe et permettrait l’émergence d’une force unie s’opposant à toute forme de fondamentalisme ».

La seconde est un discours aux responsables de la pastorale du diocèse de Velletri, le 18 septembre : « Historiquement et culturellement, la Turquie partage très peu avec l’Europe et l’englober dans l’Union Européenne serait donc une grande erreur. Il vaudrait mieux que la Turquie serve de pont entre l’Europe et le monde arabe ou forme avec ce dernier son propre continent culturel. L’Europe n’est pas un concept géographique mais culturel, qui s’est formé au cours de l’histoire, parfois conflictuelle, fondé sur la foi chrétienne. C’est un fait que l’Empire ottoman a toujours été en opposition à l’Europe. Bien que Kemal Atatürk ait bâti une Turquie laïque dans les années 20, elle reste le noyau de l’ancien Empire ottoman. Elle est donc très différente de l’Europe, qui est aussi un ensemble d’États laïcs, mais avec des bases chrétiennes, même si l’on tente injustement de le nier. Par conséquent, l’entrée de la Turquie dans l’UE serait antihistorique”. En tant que pape, Benoît XVI a toujours montré qu’il avait à cœur, plus que le destin politique de la Turquie, le sort des chrétiens de ce pays » (fin des extraits de l’article de Sandro Magister).

J’aimerais quant à moi signaler à titre indicatif que le Washington Times a tout récemment publié un Rapport de la Commission américaine Helsinki sur la situation des églises chrétiennes orthodoxes dans la partie nord de l’île de Chypre occupée militairement par les Turcs depuis 1974 : 500 églises détruites, abandonnées ou transformées ; 28 devenues des casernes, des magasins ou des hôpitaux ; 13 devenues des granges ; et 77 églises devenues des mosquées. Des milliers d’icônes, fresques, mosaïques, objets liturgiques provenant de ces églises ont été vendus.

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